The killing (saisons 1–2)

de Veena Sud, 2011–2012, ****

Sarah Linden vous dira qu’elle est tenace et que, quand elle sent la piste du meur­trier de Rosie Larsen, elle ne s’ar­rête ni aux conve­nances, ni à la politique.

L’entourage de Sarah Linden pour­rait bien vous don­ner une ver­sion dif­fé­rente. Du style : c’est une maniaque obses­sion­nelle, qui dort une fois par semaine et s’en prend à n’im­porte quel pré­su­mé inno­cent sans s’in­quié­ter des conséquences.

— Je vous avais sus­pen­due, non ? Qu’est-ce que vous fou­tez là ?
— Ben j’en­quête. M’en fous de plus avoir mon badge, de toute façon il sert à rien dans la réserve.
- pho­to Carole Segal pour AMC

L’équipier de Sarah Linden, Stephen Holder, est un peu par­ta­gé. D’un côté, il recon­naît la fli­quette tei­gneuse, volon­taire et intran­si­geante qui, pour­tant, sait lui par­don­ner ses petits sou­cis de drogue ; de l’autre, il aime­rait bien être débar­ras­sé de cette tarée qui agresse les simples témoins et qui s’oc­cupe encore du cas Larsen alors qu’elle devait démé­na­ger en Californie il y a trois semaines.

Voilà, vous avez les ingré­dients d’un polar des plus clas­siques : un duo de flics abî­més qui s’en­tendent pas tou­jours très bien, un meurtre mys­té­rieux, des hommes poli­tiques à la morale variable. Ajoutez une lichette de conflits juri­dic­tion­nels entre la réserve indienne et les auto­ri­tés locales, soi­gnez l’é­cri­ture des seconds rôles pour leur don­ner corps, arro­sez géné­reu­se­ment de cette bonne pluie de Seattle et vous obte­nez une ambiance ten­due et humide par­fai­te­ment gérée.

Allô la météo ? Vous pou­vez véri­fier un truc pour moi ? Ça fait deux minutes qu’il ne pleut pas, c’est nor­mal ? — pho­to Carole Segal pour AMC

Pas for­cé­ment très ori­gi­nale, la série a tout de même une qua­li­té : non seule­ment, comme dans toute his­toire du genre, les flics se plantent régu­liè­re­ment en sui­vant de fausses pistes, mais leurs erreurs ont de vraies consé­quences, pas seule­ment sur leur avan­ce­ment. C’est un véri­table élé­ment de ten­sion sup­plé­men­taire même si l’on peut être un peu déçu de l’ap­pa­rente aisance avec laquelle un poli­ti­cien se remet d’une erreur poli­cière réel­le­ment tragique.

Je suis un hon­nête poli­ti­cien. Vous dites ? Un oxy­more ? Comme vous y allez… — pho­to Carole Segal pour AMC

La réa­li­sa­tion fait son taf en pro­fi­tant tran­quille­ment d’une ambiance bien posée, les acteurs tiennent leurs rôles effi­ca­ce­ment, bref, les aspects tech­niques sont bien gérés.

Le résul­tat est une série poli­cière dans les grands clas­siques du genre, cer­tai­ne­ment pas révo­lu­tion­naire, mais indu­bi­ta­ble­ment accro­cheuse et équilibrée.

Notez que cette cri­tique ne concerne que les deux pre­mières sai­sons, qui forment un tout basé sur une enquête cohé­rente ; la troi­sième change de sujet mais je vais me faire un plai­sir de m’y atta­quer rapidement.