Bat*21

de Peter Markle, 1988, *

Deux hommes sont tran­quille­ment en train de vaquer à leurs loi­sirs. À l’ar­rière-plan appa­raît la coque mena­çante d’un appa­reil amphi­bie qui des­cend der­rière eux. Non, ça n’est pas la célé­bris­sime ouver­ture d’Always, mais celle de Bat*21, tour­né l’an­née d’a­vant avec des gol­feurs et un Sea King au lieu des pêcheurs et du Catalina.

Le paral­lèle s’ar­rête évi­dem­ment là : la seule femme visible dans cet énième film amé­ri­cain sur le Vietnam est une pho­to col­lée sur un tableau de bord. Ici, on a affaire à un récit pure­ment mili­taire, dont la mise en place est extrê­me­ment rapide (en vingt minutes, Hambleton est à terre et Clark tourne au-des­sus) et qui passe direc­te­ment au cœur du récit : les opé­ra­tions de secours en ter­ri­toire ennemi.

Pour vivre longtemps, vivons cachés. - capture du film
Pour vivre long­temps, vivons cachés. — cap­ture du film

Ça pour­rait être inté­res­sant. En fait, la pre­mière par­tie l’est, avec des choix nar­ra­tifs assez réus­sis — Hambleton qui se planque, Clark qui fait des allers-retours pour refaire le plein et pas­ser un maxi­mum de temps « sur zone » pour gui­der les ren­forts au besoin… Et bien sûr le code que seuls des gol­feurs amé­ri­cains peuvent com­prendre, his­toire que l’en­ne­mi ne puisse pas cal­cu­ler posi­tion et iti­né­raire du type descendu.

Mais ensuite, ça part en couille. D’abord gen­ti­ment, avec le Sea King (ver­sion amphi­bie, et non la ver­sion ter­restre uti­li­sée par l’USAF, mais pas­sons) qui se fait des­cendre héroï­que­ment après avoir refu­sé d’a­ban­don­ner la mis­sion face au feu enne­mi : c’est un peu con, mais tel­le­ment clas­sique qu’on n’y fait plus vrai­ment atten­tion. Ensuite, de manière fran­che­ment déli­rante, quand le gen­til pilote de Skymaster décide de voler un Iroquois, alors qu’il n’a pas pilo­té d’hé­li­co depuis quinze ans, pour aller seul et sans défense réus­sir là où les copains se sont fait des­cendre en étant nom­breux et équipés.

Je cherche toujours une situation où cette scène aurait réellement eu lieu, mais Hollywood l'aime beaucoup. - capture du film
Je cherche tou­jours une situa­tion où cette scène aurait réel­le­ment eu lieu, mais Hollywood l’aime beau­coup. — cap­ture du film

Là, on tombe dans les réflexes les plus débiles des films de guerre roman­cés : on a une anec­dote pour faire un film d’une heure et demie, mais on n’a pas de finale explo­sif et hol­ly­woo­dien, alors après être res­té dans les clous pen­dant une heure en sui­vant à peu près l’his­toire réelle, on passe en mode « faut que ça pète », notre héros pose ses couilles sur la table et fait n’im­porte quoi, et la fin fait hal­lu­ci­ner les gens vague­ment inté­res­sés par la réalité.

Le pire, c’est qu’en l’oc­cur­rence il y avait matière à faire une fin peut-être moins spec­ta­cu­laire, mais bien ten­due : après que l’Air Force a per­du cinq appa­reils et une petite quin­zaine d’hommes, c’est un duo de com­man­dos (un Seal et un Sud-Vietnamien) qui a récu­pé­ré le vrai Hambleton, volant au pas­sage un sam­pan pour se faire pas­ser pour des pêcheurs locaux. Ça aurait pu faire une très jolie fin aus­si, mais le réa­li­sa­teur devait vou­loir son quo­ta d’explosions…

Y'a Hackman et Glover mais le premier rôle, c'est le Skymaster. - capture du film
Y’a Hackman et Glover mais le pre­mier rôle, c’est le Skymaster. — cap­ture du film

Pour les fans de choses volantes, le Skymaster (qui est très mignon-moche comme avion) est par­ti­cu­liè­re­ment mis en valeur et vu sa rare­té sur grand écran, on ne va clai­re­ment pas s’en pri­ver ; mais pour les autres, la der­nière demi-heure dis­qua­li­fie tota­le­ment ce qui aurait pu être un film de guerre correct.