S.O.S. fantômes

de Paul Feig, 2016, ****

Il y a des jours où je ne com­prends pas l’hu­ma­ni­té. Par exemple, quand je vois que Jason Bourne, sombre bouse dépour­vue de toute trace de scé­na­rio et réa­li­sée par un type qui confond « camé­ra à l’é­paule » et « soi­rée Orangina », se paie de meilleures notes (Allociné : 3,3 presse, 3,6 public ; SensCritique : 6,1 ; IMDB : 7,1) que S.O.S. fan­tômes (2,8, 2,8, 5,6, 5,5, respectivement).

Dieu mer­ci, il y Rotten Tomatoes, qui donne à la mau­vaise suite un médiocre 57 et au très bon remake un hon­nête 74.

S.O.S. fan­tômes, mil­lé­sime 2016, repose sur une poi­gnée de fon­da­men­taux : on efface tout et on recom­mence, on mul­ti­plie les clins d’œil pour les fans des années 80 (l’ar­ri­vée de Bill Murray dans un rôle aux anti­podes de celui qu’il tient dans la ver­sion ori­gi­nale par exemple), on garde un humour basique mais effi­cace, on détourne les codes des films d’hor­reur, on appuie un poil trop sur cer­taines vannes mais dans l’en­semble on évite de des­cendre au niveau Camping 3, et en bonus on joue sur les codes sexistes en les retour­nant tranquillement.

Je suis blond à l'intérieur comme à l'extérieur. J'ai le job ? - photo Sony Pictures
Je suis blond à l’in­té­rieur comme à l’ex­té­rieur. J’ai le job ? — pho­to Sony Pictures

Je dis pas ça parce que l’é­quipe de S.O.S fan­tômes est main­te­nant fémi­nine, mais parce que Chris Hemsworth est encore plus réduit au rôle d’homme-objet que dans tous les der­niers Marvel réunis. Décoratif, stu­pide, bon à rien mais déco­ra­tif, il venge à lui seul les géné­ra­tions d’ac­trices contraintes de jouer des midi­nettes par la faute de scé­na­ristes abru­tis. C’est clai­re­ment la très grande réus­site du film, celle qui le fait pas­ser du sta­tut d’hon­nête comé­die à celui de moment de ciné sus­cep­tible d’é­veiller le spectateur.

Graphiquement, l'original se prend d'un coup trente ans dans les dents. - photo Sony Pictures
Graphiquement, l’o­ri­gi­nal se prend d’un coup trente ans dans les dents. — pho­to Sony Pictures

Pour le reste, la trame géné­rale est fidèle aux deux films d’il y a trois décen­nies ; elle mêle des élé­ments de l’un et de l’autre, moder­nise tout cela avec une dose de gee­kisme assu­mée, lie la sauce avec assez de soin et retouche suf­fi­sam­ment d’élé­ments pour être à la fois une digne héri­tière et une œuvre ori­gi­nale. Les aspects tech­niques n’ont rien de vrai­ment remar­quable (sauf quand on se sou­vient des effets spé­ciaux des années 80), mais l’his­toire est bien menée et les auteurs ont eu la bonne idée de ne pas essayer d’in­té­grer de force les sketches impla­çables : ceux qui ne ren­traient pas dans le scé­na­rio sont ren­voyés au géné­rique, per­met­tant au film de gar­der son rythme naturel.

Ce n’est clai­re­ment pas l’œuvre de l’an­née, ce n’est même pro­ba­ble­ment pas la comé­die de l’an­née, mais ça se regarde sans déplai­sir et Chris Hemsworth lui fait gagner une étoile — rien que ça, c’est un évé­ne­ment qui mérite d’être vu.