Licorice pizza

de Paul Thomas Anderson, 2021, ****

Alana est assis­tante pho­to­graphe, Gary lycéen. Mais c’est l’é­poque du « j’ai fait un peu de tout, un peu par­tout, sans savoir rien faire » :  au fil des occa­sions et des hasards de la vie, ils deviennent un peu acteurs, ven­deurs de lits, cas­ca­deurs, assis­tants d’homme poli­tique, gérants de salle d’ar­cade, ali­bis pour homos…

Les héros dans le camion
Okay, je sais qu’on peut tout essayer, mais le camion de nuit en marche arrière, t’es sûre ? — pho­to Metro-Goldwyn-Meyer

Ne cher­chez pas une his­toire cohé­rente : ce sont les années 70, avec leur lot d’op­por­tu­ni­tés aléa­toires, d’en­tre­prises qui dis­pa­raissent sans pré­ve­nir, de chocs pétro­liers et d’a­mours plus ou moins libé­rées. Une époque où les jeunes peuvent bal­lot­ter d’un petit bou­lot à un autre, d’une ville à une autre, d’un lit à un autre, ten­ter leurs chances sans trop s’in­quié­ter de l’a­ve­nir, se ramas­ser, se rele­ver… Une époque sans doute un peu fan­tas­mée de nos jours, dont on conti­nue à écou­ter les piz­zas réglisse avec délec­ta­tion (faute dire que der­rière, y’a eu les vagues dis­co et dance, qui sont à l’his­toire de la musique ce que les années sida sont à celle de la sexua­li­té…), en se disant que ça devait être mieux avant.

Le film est à l’i­mage de cette époque : un fan­tasme bor­dé­lique, concen­tré sur les déchi­re­ments et les rap­pro­che­ments de ses per­son­nages, les situa­tions absurdes et hila­rantes, les bonnes inten­tions qui partent en vrille sans pré­ve­nir, les petits et grands drames de la vie, l’in­sou­ciance pas si insou­ciante de la jeunesse.

Sean Penn et Alana Haim en moto
Tu vois l’é­va­sion à moto qui avait deman­dé deux mois de réglages aux cas­ca­deurs ? Allez hop, à l’im­pro­vi­sade ! — pho­to Metro-Goldwyn-Meyer

Quelques plans sont magni­fiques, la bande-son à elle seule mérite le dépla­ce­ment, les acteurs sont justes et natu­rels (même quand ils jouent un pro­duc­teur taré qui menace tous ceux qu’il croise). Bref, ce petit film sans pré­ten­tion, tota­le­ment inra­con­table, est aus­si un grand moment de comé­die semi-roman­tique, enle­vée, absurde juste ce qu’il faut, fran­che­ment réussi.