La mule

de Clint Eastwood, 2018, ***

Un mau­vais Clint Eastwood, c’est déjà un bon film1. C’est un peu le bilan de son petit der­nier, La mule, l’his­toire d’un vieil hor­ti­cul­teur pour qui les fleurs sont plus impor­tantes que la famille, dont les serres sont liqui­dées, et qui se retrouve à gagner sa vie en trans­por­tant des sacs pour un cartel.

Présenter des hémé­ro­calles dans des expos et être applau­di par le public : ça, c’est la vie ! — pho­to Claire Folger pour Warner Bros

Le film se déroule en effet de manière assez tran­quille, avec un enchaî­ne­ment logique, quelques pas­sages un peu cari­ca­tu­raux (les rela­tions entre Stone et sa fille en par­ti­cu­lier) qui passent par la grâce d’ac­teurs en grande forme, des moments de ten­sion sans excès, quelques enjeux çà et là, un bon équi­libre entre pre­miers et seconds rôles… et c’est tout.

Se faire arrê­ter par un flic et le tenir loin de mon coffre : ça fait par­tie du bou­lot… — pho­to Warner Bros

Pas de souffle épique, pas de grande révé­la­tion, pas de véri­table enjeu moral (le seul pro­blème quand on trans­porte 300 kg de cocaïne, c’est de convaincre les flics de pas regar­der dans le coffre)… Du coup, pas non plus de leçon de vie comme Clint a par­fois ten­dance à en faire, ce qui peut être repo­sant aus­si, d’une cer­taine manière. Reste juste la vie ordi­naire d’un connard égo­cen­trique ordi­naire qui trouve un moyen de faire de l’argent et, à l’ap­proche de la tombe, s’a­per­çoit qu’il aime­rait bien voir sa famille de temps en temps.

Sur le plan for­mel, tout est évi­dem­ment maî­tri­sé, de l’ins­tal­la­tion de l’é­clai­rage à la fin du mon­tage. Il est notable que la pho­to a été confiée à Yves Bélanger ; non qu’il four­nisse un style par­ti­cu­lier (c’est un tra­vail propre, avec quelques beaux plans, mais sans flam­boyance spé­ci­fique), mais Eastwood n’a­vait plus fait un film sans Tom Stern depuis Bloodwork, en 2002 !

Me faire pour­rir par ma fille parce que ça fait 15 ans que je l’ai pas vue : un peu moins fun. — pho­to Claire Folger pour Warner Bros

Rien à signa­ler, en somme ? C’est un peu ça, oui. Polar cor­rect, film fami­lial cor­rect, offrant quelques belles scènes et souf­frant de quelques faci­li­tés, La mule est un gen­til câlin au coin du feu un soir d’hi­ver, loin des jouis­sances pas­sion­nelles que pou­vaient être Gran Torino, Sully, Million dol­lar baby ou Impitoyable, mais tou­jours agréable.

  1. Mention non contrac­tuelle, Pale Rider en témoigne.