Deepwater Horizon

de Peter Berg, 2016, ***

Dans les films catas­trophes, il y a ceux qui se concentrent sur la catas­trophe elle-même, ceux qui s’in­té­ressent sur­tout à ses pré­misses et ses signes annon­cia­teurs, ceux qui étu­dient l’a­près — la sur­vie, les secours, tout ça — et ceux qui tournent autour des actes de quelques per­son­nages résistants.

Deepwater hori­zon (dont la dis­tri­bu­tion fran­çaise a ampu­té le titre, pour une rai­son mys­té­rieuse) est tout cela à la fois. Il a la longue mise en place où l’on explique assez pré­ci­sé­ment ce qui va mer­der, il a l’é­vé­ne­ment spec­ta­cu­laire réa­li­sé avec moult explo­sions et rebon­dis­se­ments, il a les per­son­nages exté­rieurs qui vont se ruer sur place pour sau­ver ce qui peut l’être, et il suit sur­tout une série de héros ordi­naires qui annoncent la catas­trophe contre ceux qui n’y croient pas, puis tentent d’y sur­vivre en sau­vant les autres.

Arrivée sur Deepwater Horizon. - capture de la bande-annonce
Arrivée sur Deepwater Horizon. — cap­ture de la bande-annonce

Bourré de cli­chés ? Un peu. Deepwater hori­zon est un méta-film catas­trophe, qui pioche chez tous les ténors du genre. Mais, curieu­se­ment, peut-être parce qu’il se base sur des évé­ne­ments réels (sacré­ment roman­cés, ras­su­rez-vous), peut-être parce qu’il ajoute une vraie dose d’hom­mage aux simples pékins sou­mis aux rouages d’une grosse machine finan­cière, peut-être parce que le cas­ting compte quelques têtes capables de don­ner du corps à n’im­porte quel dia­logue creux, peut-être parce que Peter Berg est tou­jours un fai­seur très effi­cace qui sait exac­te­ment jus­qu’où aller dans le spec­tacle et quand reve­nir à un réa­lisme rugueux, peut-être donc pour tout cela, il tourne bien. Il est inté­res­sant, entraî­nant, l’am­biance se trans­for­mant peu à peu en ten­sion puis en explo­sion, et sa seconde moi­tié est un spec­tacle pyro­tech­nique très réussi.

Vu comme il filme ces "gueules noires" modernes, j'attends avec impatience un film de Berg sur la catastrophe de Courrières. - photo Lionsgate
Vu comme il filme ces « gueules noires » modernes, j’at­tends avec impa­tience un film de Berg sur la catas­trophe de Courrières. — pho­to Lionsgate

Soyons hon­nête, il n’est pas bon au point de jus­ti­fier son excel­lente note dans les cri­tiques presse : celles-ci ont été rehaus­sées par l’as­pect poli­tique que beau­coup ont vu au film — les pro­lé­taires qui se tuent au tra­vail pour le compte de la méchante mul­ti­na­tio­nale finan­cière. Ils oublient juste que les petits gars ordi­naires qui connaissent leur taf et tentent d’empêcher une catas­trophe impo­sée par leurs auto­ri­tés, c’est qua­si­ment un pas­sage obli­gé du genre ; c’est même le res­sort qua­si-sys­té­ma­tique d’un inépui­sable lot de télé­films-catas­trophes amé­ri­cains des quinze der­nières années. Quand on s’ap­pelle L’Obs, Télérama ou Libération et qu’on a envie de voir un « drame d’ac­tion à la gloire des pro­los » avec une « conscience sociale » et un « plai­doyer pour la classe ouvrière », on y voit exac­te­ment ça, mais le res­sort est en fait exac­te­ment le même que celui des sis­mo­logues de San Andreas, des cli­ma­to­logues du Jour d’a­près ou du héros du Pic de Dante.

Les secours sont également bien présentés. - capture de la bande-annonce
Les secours sont éga­le­ment bien pré­sen­tés. — cap­ture de la bande-annonce

Mais la réa­li­sa­tion extrê­me­ment effi­cace, les expli­ca­tions rela­ti­ve­ment cohé­rentes, les effets spé­ciaux convain­cants et le cas­ting aux petits oignons assurent un film catas­trophe réus­si et entraî­nant. Il ne cherche pas à sor­tir de son sta­tut pour deve­nir un grand film poli­tique ou une para­bole phi­lo­so­phique mais, pour les ama­teurs du genre, il a tout pour deve­nir un petit clas­sique très apprécié.

Je note­rai tout de même en pas­sant quelques erreurs de tra­duc­tion mani­festes, en par­ti­cu­lier dans la pre­mière par­tie — celle des pré­sen­ta­tions tech­niques. Ainsi, le S‑92 de Bristow Helicopters qui amène les mineurs sur la plate-forme est imma­tri­cu­lé N492BG ; logi­que­ment, le contrôle aérien l’ap­pelle « Bristow 2 Bravo Golf », confor­mé­ment à l’u­sage amé­ri­cain (type ou opé­ra­teur, puis trois der­niers carac­tères de l’im­ma­tri­cu­la­tion). Quand le sous-titre indique « B2-BG », vous savez que le tra­duc­teur a confon­du « Bristow » et « Bravo » et qu’il a ajou­té un trait d’u­nion au hasard. Distributeurs, encore une fois : pour les sujets tech­niques, pre­nez des tra­duc­teurs tech­niques, bon sang !