Les anarchistes
|d’Élie Wajeman, 2014, ***
Jeune, ambitieux et sans famille : le brigadier Jean Albertini a toutes les qualités pour une mission d’infiltration. Il est donc envoyé dans une clouterie pour se rapprocher d’Élisée Mayer, un des meneurs d’un groupe d’anarchistes qui parlent de prendre les armes et de voler les bourgeois.
La suite est assez évidente : c’est un trio sentimental sans grande originalité que Wajeman explore, en le mâtinant d’un double-jeu policier lui-même fort classique. Tout le monde fait plutôt bien son travail : les acteurs sont bons (le côté exagérément naïf d’Exarchopoulos peut agacer un peu, le monolithisme ténébreux de Gouix aussi, mais dans l’ensemble ça passe), la photo est propre et agréable, la reconstitution est sympathique et je n’ai pas vu d’anachronisme trop criant (en même temps, la Belle époque n’est pas loin s’en faut ma période de prédilection), le montage et réalisation sont efficaces… Le film souffre d’une faiblesse au niveau des dialogues, dont le langage très soutenu rappelle le théâtre plus que le cinéma, mais il est dans l’ensemble techniquement réussi.
Son problème, c’est que finalement il ne fait qu’effleurer ses différents sujets. Un exemple : l’ancienne maîtresse de Jean, qu’il croise dans un bar et risquerait de détruire sa couverture ; évacuée en deux phrases, elle ne laisse finalement aucune trace, ni dans son esprit, ni dans celui de ses camarades, laissant l’amorce de suspense retomber immédiatement. Le dénouement lui-même n’offre finalement guère de tension et laisse le spectateur retourner à ses activités ordinaires sans plus l’impliquer que cela.
Il y avait un potentiel pour faire un film nerveux, un thriller haletant ou un polar psychologique ; il y avait même matière à faire un triangle amoureux tendu. Mais finalement, c’est une distraction agréable et vaguement insipide qui nous est servie.