Aux yeux de tous

de Cédric Jimenez, 2011, ***

Des camé­ras, il y en a par­tout. De tout évé­ne­ment moderne, nous avons des images ani­mées, sou­vent avec le son, sou­vent en direct ou presque — juste le temps que les chaînes d’in­fo conti­nues reçoivent les mails des pro­prié­taires de camé­ras, camé­scopes, appa­reils pho­to, télé­phones, web­cams ou autres. Et si par hasard per­sonne n’est en train de fil­mer un truc, il y a encore les camé­ras de vidéo­sur­veillance qui poussent comme des cham­pi­gnons dans une chambre noire.

Dès lors, le type qui aurait accès à toutes les camé­ras serait le maître de l’in­for­ma­tion. Il sau­rait ce que per­sonne ne voit, tra­que­rait ceux que per­sonne ne peut suivre, connaî­trait ceux que per­sonne n’i­den­ti­fie, et racon­te­rait ce que per­sonne ne comprend.

Aux yeux de tous, c’est ça : le film des films. Un nerd trouve une bande que les auto­ri­tés cachent, remonte la piste d’un poseur de bombes, et part à l’as­saut de la filière qui l’a fait agir. En sur­veillant, en temps réel, tout ce qui se passe, dans l’en­vi­ron­ne­ment du pan­tin ou dans celui des marionnettistes.

Le pro­blème, c’est qu’on ne sait pas bien ce que ça veut dire. Démonstration du pou­voir de la vidéo ? De l’im­por­tance de l’in­for­ma­tion ? Théorie du com­plot ? Anti-théo­rie du com­plot ? Plaidoyer pour une géné­ra­li­sa­tion de la vidéo­sur­veillance ou inci­ta­tion à regar­der autour de soi ? Le film se perd un peu dans son pro­pos, et la démons­tra­tion que l’on vou­drait impla­cable devient un flou artis­tique sans por­tée réelle.

Restent plu­sieurs qua­li­tés, la pre­mière étant bien enten­du tech­nique : oui, quand on « croppe » une image de camé­ra de sécu­ri­té, ça pixel­lise à mort et le résul­tat est à peine visible ; non, on ne peut pas tout faire quand quel­qu’un éteint son télé­phone ou débranche sa web­cam ; et non, on n’est pas tota­le­ment invi­sible quand on pirate une web­cam (la plu­part ont un voyant qui s’al­lume quand elles sont actives, pira­tées ou pas).

Au final, c’est pas mal fait, bien joué et super­be­ment mon­té, et ça fait rêver tous les jour­na­listes ou flics blo­qués dans une enquête, mais ça manque un peu d’axe scénaristique.