Macbeth
|somnifère écossais de Justin Kurzel, 2015
L’Écosse. Terre farouche, généreuse en vent et en froidure plus qu’en nourriture, il faut pour y survivre une robuste constitution et un goût prononcé pour le whisky. Et pour y devenir quelqu’un de notable, il faut une robuste constitution, un goût prononcé pour le whisky, une propension à saigner ses adversaires et une complète absence de scrupules. Macbeth a presque tout bon : l’absence de scrupules, c’est sa femme qui l’a. Du coup, après avoir montré ses muscles, bu un coup et saigné son roi sensé, généreux et amical, il se fait doucement ronger par la culpabilité et devient lui-même un roi instable, stérile et dictatorial.
Adapter Shakespeare est toujours un petit défi : l’anglais ayant beaucoup changé depuis son ère, les textes marquent leur âge. Du coup, une reconstitution d’époque risque d’être chiante pour les gens normaux, une transposition moderne fait hurler les puristes, et garder le vieux texte sur une mise en scène actuelle (Roméo + Juliette par exemple) ne plaît à personne (sauf aux tarés dans mon genre).
Kurzel a donc tenté autre chose : faire une évocation gothique moyenâgeuse en s’offrant une mise en scène originale, ni classique ni moderne, cherchant à mettre en valeur les démons intérieurs de Macbeth. Le résultat est au delà du théâtral, avec des pauses interminables le temps que les répliques rentrent bien, une musique envahissante pour souligner chaque élément, des ralentis extrêmes façon Spartacus, et des plans associant par pure magie rythme mou et cadrage dur.
Stylisé à l’excès, artificiel comme c’est pas permis, théâtral au mauvais sens du terme, égocentrique et prétentieux, cet exercice d’une totale vanité est un peu le fils naturel du théâtre nō et d’un mauvais Kubrick. De quoi vous endormir aussi sûrement que Le guerrier silencieux ou Nuit de chien.