Les survivants du Goliath
|de Kevin Connor, 1981, **
La vie parfois fait plouf.
Pour Peter, c’est même son quotidien : il est plongeur en eaux profondes sur un navire scientifique qui recherche du manganèse dans l’Atlantique. Mais un jour, le sonar révèle une masse métallique de trois cents mètres de long, avec trois trucs plus hauts qui dépassent, et les vieux reconnaissent immédiatement le Goliath, un paquebot disparu corps et âmes au début de la Seconde Guerre mondiale. Peter et ses camarades sautent dans leur sous-marin à cloche de compression intégrée, le chargent au trimix, et descendent voir. Là, Peter a la surprise d’entendre des chocs formant le SOS habituel depuis 1909, puis de la musique, puis de voir une jeune fille dans l’épave…
La première fois où j’ai vu ce téléfilm, je devais avoir une quatorzaine d’années. Et je l’avais à peu près oublié, jusqu’à il y a quelques jours, où pour je ne sais quelle raison il m’est revenu à l’esprit. Et donc, je me suis mis en devoir de le revoir, pour vérifier s’il était étonnamment bon pour un téléfilm de 1981 ou si je manquais vraiment de cerveau à quatorze ans (j’aimais JAG et Aigle de fer, par exemple, et je comprenais pas la moitié du Prince de Bel-Air).
Et bien… Il y a du bon et du moins bon.
Côté positif, évidemment, Christopher Lee, encore tout jeunot (il n’avait même pas soixante ans lors du tournage) mais déjà très bon dans les rôles de types qui se prennent pour Dieu (non sans arguments il est vrai). Le reste du casting fait le taf, sans mériter d’applaudissement ni de critique particulière ; tout au plus regrettera-t-on le surjeu de Frank Gorshin, mais son personnage est construit comme ça.
Autre détail positif, pour les geeks dans mon genre du moins, les scénaristes ont fait l’effort d’expliquer comment et pourquoi trois cent trente-sept personnes ont réussi à survivre dans une épave par trois cents mètres de fond, au lieu de tous crever de froid et de narcose à l’azote. Ils ont même calculé quelle proportion d’oxygène il fallait pour avoir une pression partielle respirable à cette profondeur.
En revanche, les mêmes geeks s’étonneront que tout le monde ait une voix normale (alors qu’on a bien expliqué qu’il y a de l’hydrogène dans leur mélange) et seront très surpris d’apprendre que l’épave a pu se poser en douceur sur le fond, alors que son volume porteur a dû être divisé par trente en quelques heures1. Il admireront aussi ces très jolis équipements jaunes et oranges curieusement visibles même hors du champ des projecteurs, alors qu’on est censé être à une profondeur où seule une très faible trace de lumière d’un bleu profond peut éventuellement parvenir. Et que dire de cette jauge capable de mesurer la richesse du mélange hydrogène/oxygène, précisément graduée en usine pour indiquer la limite d’inflammabilité ? Si je vois bien l’intérêt une fois au fond de l’eau, je cherche bien quelle raison aurait pu pousser à équiper un bateau censé flotter d’un truc pareil… Il aurait été plus cohérent, si le compte à rebours exigeait cet accessoire, de faire une jauge bricolée et marquée au feutre.
Mais au-delà des détails, il y a un gros point faible : les ficelles du scénario. Si on avait disposé de trucs de ce diamètre pour amarrer le City of New York, il ne serait jamais venu frôler le Titanic. Il n’y a pas un rebondissement qui ne soit téléphoné et, sitôt compris les rôles du génie égocentrique, du vilain homme de main, du héros héroïque, de son sidekick et de la jeune fille à séduire, la suite se déroule comme prévu.
Ceci étant, ça tourne plutôt bien, malgré quelques langueurs dans la dernière partie. C’est une distraction efficace, relativement originale dans une ère où les films-catastrophes étaient légion mais où les secours étaient beaucoup plus rarement traités (avec la notable exception du troisième Airport). Il n’y a pas de quoi se relever la nuit et je n’en aurai sans doute à nouveau qu’un vague souvenir dans un mois, mais ça se laisse regarder.