Outland

de Peter Hyams, 1981, **

Perdue loin de tout, c’est une sta­tion minière typique : des mineurs qui tra­vaillent dur dans des condi­tions dan­ge­reuses et s’a­musent dur le soir venu, un bar/bordel qui les accueille, une com­pa­gnie qui pos­sède de fait l’en­droit depuis qu’elle a obte­nu sa conces­sion, et un petit bureau de police qui doit avant tout main­te­nir le calme. C’est là que débarque William O’Niel, un mar­shal à la car­rière mori­bonde. Et, alors que sa femme et son fils décident de quit­ter la mine pour retour­ner vers la civi­li­sa­tion, il découvre un tra­fic de drogue sou­te­nu par le direc­teur d’ex­ploi­ta­tion. Après une pre­mière escar­mouche, le mot cir­cule : celui-ci a embau­ché une équipe de tueurs, qui arri­ve­ront par le pro­chain train. Alors que les autres poli­ciers décident de regar­der ailler, O’Niel n’a plus qu’à choi­sir : prendre le chèque et éven­tuel­le­ment suivre sa famille, ou affron­ter seul les hommes du contremaître/dealer…

Sean Connery en uniforme de marshal
Un vrai wes­tern, avec son mar­shal bou­gon qui débarque sur la fron­tière… — pho­to Warner Bros

Oui, bon, dit comme ça, on dirait un remake de Le train sif­fle­ra trois fois, avec un divorce à la place du mariage et qui com­men­ce­rait avant l’an­nonce de l’ar­ri­vée des tueurs. Je vous ras­sure : tout le monde a noté la simi­li­tude, qui est abso­lu­ment volontaire.

Il y a tout de même une petite dif­fé­rence : la mine est sur Io, la civi­li­sa­tion est sur Terre, et en fait de train, c’est par une navette spa­tiale que les assas­sins arrivent. Du coup, on a des scènes de décom­pres­sion explosive(s), des pas­sages en gra­vi­té réduite au-des­sus d’hec­tares de pan­neaux solaires, des plans larges sur une plate-forme de forage avec vue sur la Grande Tache rouge.

Plan sur la station et Jupiter dans Outland
Un vrai wes­tern, avec ses plans larges sur un pay­sage désert… — pho­to Warner Bros

En revanche, pas de rayons laser ni de murs blancs imma­cu­lés : Peter Hyams pré­fère une science-fic­tion réa­liste, avec des tech­no­lo­gies maî­tri­sées et un niveau de pro­pre­té conforme à toutes les mines creu­sées par notre espèce. On est donc plus près de l’u­ni­vers d’Alien que de Star Wars.

En dehors de ces détails, ce wes­tern spa­tial se déroule sans grande sur­prise, cochant toutes les cases de la bonne his­toire de mar­shal sur la fron­tière et les assai­son­nant de quelques inco­hé­rences (ah, les sons dans le vide, ce grand clas­sique…). Sa prin­ci­pale qua­li­té, fina­le­ment, est d’af­fir­mer que le cynisme est inhé­rent au capi­ta­lisme : la com­pa­gnie par­ti­cipe acti­ve­ment au tra­fic de drogue afin d’aug­men­ter la pro­duc­ti­vi­té, sans égard pour la sécu­ri­té de ses employés — un clas­sique du 19e siècle, tou­jours valable au 21e.

Mineurs prêts à descendre dans le puits
Un vrai film social, avec sa mine sale et son contre­maître véreux. — pho­to Warner Bros

L’ensemble est donc une hon­nête série B, bien menée par un Sean Connery qui com­mence à vieillir (il venait d’a­voir cin­quante ans1) et à s’o­rien­ter vers les rôles de gri­son­nant bou­gon qui lui vau­dront sa plus belle car­rière. Ça se regarde avec plai­sir, mais sans éblouissement.

  1. Et j’é­tais au chaud dans le ventre de ma mère…