Tout simplement noir
|de Jean-Pascal Zadi et John Wax, 2020, ***
Il y a des films dont on peut parler des heures, d’autres dont on a l’impression d’avoir fait le tour en dix minutes. Celui-ci fait partie de ceux-ci, mais ça n’est pas une injure.
Jean-Pascal est un acteur raté. Plutôt que de blâmer sa bêtise, son manque de talent ou son don pour prendre les gens à rebrousse-poil, il estime que c’est parce qu’en France, on met des bâtons dans les roues des artistes noirs. Il veut donc lancer une grande marche des Noirs, de Nation à République. Et pour cela, il fait le tour des Noirs de Paris et d’ailleurs à la recherche de soutiens plus connus que lui.
Le fil rouge, si tant est qu’il y en ait un : il n’y a pas de « communauté noire ». Le concept est aussi con que « communauté blanche », les Noirs n’étant pas unis dans une culture, une langue ou même une couleur unique. Certes, un acteur martiniquais, une humoriste ivoirienne, un chanteur dionysien ou une journaliste réunionnaise souffrent du même racisme ambiant, mais cela n’en fait pas une communauté.
JP l’illustre lui-même en estimant spontanément que les femmes et les Indiens n’ont rien à faire dans sa marche, qui est destinée à mettre en avant les problèmes de JP, pardon, il voulait dire : les problèmes des hommes noirs d’origine africaine (les Malgaches et les Maghrébins, déjà, c’est limite). Au fur et à mesure qu’il rencontre des gens, il met en lumière leur diversité d’origines, de trajectoires, de cultures, de genres, de teintes même, leur seul point commun étant de vivre dans le même coin de la planète et d’avoir une concentration élevée d’eumélanine.
En dehors de cela, il s’agit d’un film à sketches agréable, qui reprend et détourne clichés et idées reçues au fil de saynètes plutôt enlevées, avec un casting assez extraordinaire — de Bedia à Tagbo en passant par Dhorasoo et Kassovitz. On sourit souvent, on rit parfois, on ne se fatigue pas trop le cerveau mais certains retournements sont moins idiots qu’il n’y paraît (comme lorsque les femmes parviennent à faire comprendre à JP que tant qu’il refuse qu’elles participent, il n’est pas moins ségrégationniste que ceux qu’il dénonce). Oh, et la séquence où JP et Fary vont en pleine nuit dans la cambrousse pour rencontrer un mystérieux fan anonyme est extraordinaire.
Un grand film ? Assurément pas. Mais une belle série de saynètes enjouées qui tournent comme un coucou suisse et font marrer régulièrement, sans aucun doute. Et donc, un excellent moyen de passer un bon moment.