Ad astra
|de James Gray, 2019, *
On parle beaucoup, dans ce film, de la Terre, de Mars, de Jupiter, de Saturne et de Neptune. Vous notez un truc qui manque ?
Oui. Uranus.
Je subodore que le réalisateur a sauté celle-ci comme un message, pour apporter une réponse subliminale à la question : « Where did you find this script ?« 1
Parce qu’en fait, le voilà, le scénario :
répète 15[
péripétie absurde où Brad Pitt sauve la situation
gros plan sur Brad Pitt passant une évaluation psychologique
gros plan sur Brad Pitt disant un truc sur son pôpa mort
]
Je vous l’ai écrit en LOGO pour ça soit facile à comprendre, mais je vous laisse le refaire en Pearl ou en C♯ si ça vous amuse.
Certes, il y a de bonnes idées. La scène d’ouverture est un peu bizarre (que fout cet interrupteur à cet endroit ?), mais spectaculaire et particulièrement prenante. La course-poursuite lunaire est peut-être là juste pour faire plaisir à un fan de westerns, mais elle est haletante, renforcée par une excellente gestion du bruit — sans atmosphère, il n’y a de son que quand on touche quelque chose… En passant, le statut de la Lune, transposition de l’Amérique du 17e siècle, est évoqué discrètement, pour rappeler que l’humanité répète souvent les mêmes erreurs sans pour autant s’appesantir sur le sujet.
Mais il y a tout le reste. Ces situations complètement absurdes, ces vaisseaux spatiaux conçus n’importe comment, ces réactions absolument incohérentes des personnages, tout ça pour arriver au but qu’avait fixé le scénariste : Fiston-Couilles-d’Acier, seul, sur les traces de Pôpa-ce-Héros-au-Regard-Si-Dur2. On est typiquement dans le cas d’un auteur qui a l’idée de la scène culminante de son film et qui part de celle-ci, remontant les événements précédents pour la justifier, au lieu de chercher comment son point de départ pourrait mener logiquement à la fin voulue.
L’exemple le plus frappant, c’est quand Fiston-Couilles-d’Acier se fait bouler de la mission parce qu’on n’est pas sûr de sa stabilité psychologique. Choupette DeMars 3 débarque et accuse Pôpa d’avoir pété les plombs et assassiné ses parents. En toute logique, elle devrait être rassurée de voir que cette fois-ci, on a filtré le taré et laissé partir uniquement des astronautes équilibrés. Mais non : elle, hop comme ça au débotté, elle décide d’aider Fiston et son profil psy en carton-pâte à s’infiltrer dans la mission. Je vois vraiment pas ce qui pourrait mal se passer.
Et puis, bon, il y a cette fin où le héros est retourné comme un gant, où il change complètement de caractère et d’objectifs… Comme si, jusqu’au bout, le scénariste tenait à faire savoir qu’il n’avait aucune idée de qui était son personnage ni de ce que racontait son histoire.
Du coup, malgré quelques belles scènes et un casting aux petits oignons, ça reste globalement piètre.
- Désolé, ce jeu de mots hilarant n’est accessible qu’à un public anglophone.
- Oui, ça fait long comme nom. Comme son vrai nom, tellement long qu’on a remplacé son prénom par une initiale.
- Qui fait un bon mètre soixante alors qu’elle a toujours vécu sur Mars : elle doit avoir la génétique de Passe-Partout.