Mosquito squadron
|de Boris Sagal, 1969, **
Le 18 février 1944, les Mosquito des escadrons 21, 464 et 487 ont attaqué la prison d’Amiens. Le bilan est discutable (sur 700 prisonniers, une centaine furent tués durant le raid, moins de 250 s’évadèrent et la plupart d’entre eux furent repris), mais cette opération resta dans les annales, un peu par la précision des bombardements réalisés à haute vitesse et basse altitude et beaucoup par la présence d’un Mosquito de l’unité de reconnaissance photographique, qui permit à la RAF d’en faire un petit film de propagande.
Vingt-cinq ans plus tard, cette matière fut reprise par Donald Sanford, qui y mêla un site de production d’armes V, un château, un pilote anglais capturé, la « veuve » de celui-ci et son frère/ailier, pour faire Mosquito squadron. Et si la liste des ingrédients ne suffisait pas, la distribution française s’est occupée de ridiculiser un peu plus le film en l’affublant du surnom « Opération V2 », bien qu’il ne soit absolument jamais question de V2 — le Comité anti-traductions foireuses considère comme de la légitime défense de cracher à la figure de quiconque utiliserait le titre français.
« Ridiculiser » est un peu exagéré, mais il y a deux Mosquito squadron. Le premier est un film de guerre aérienne dont certains aspects techniques sont plutôt bien traités, comme l’entraînement spécifique à l’utilisation des bombes rebondissantes (prévues pour les attaques sur l’eau, elles ne furent pas utilisées à Amiens, mais pour le coup c’est un élément d’intrigue intéressant) et l’organisation des multiples passes sur les objectifs, tunnel de l’usine et prison. Les quelques scènes en vol sont relativement réussies pour les années 60, même si pour le coup le film a dû prendre un gros coup de vieux quelques mois plus tard avec la sortie de La bataille d’Angleterre, et on ne voit pas souvent la merveille en bois sur les écrans donc ça fait plaisir. Le budget limité a bien imposé des montages à l’arrache, les acteurs n’ont jamais mis les pieds dans un avion et cherchent encore à quoi sert un masque à oxygène, et l’utilisation de maquettes pour certaines scènes est un peu visible, mais on a vu bien pire.
Mais d’autres aspects sont franchement foireux. La romance passerait si elle se contentait de rappeler que les Anglais jouaient à domicile, gardant un contact régulier avec leurs familles, et de montrer un peu l’ambiance « on sera peut-être morts nous aussi demain, on n’a pas le temps d’attendre de faire notre deuil » ; mais elle en fait trop ou pas assez et les acteurs n’ont pas spécialement l’air de croire à leurs dialogues, il est vrai franchement mous du genou. Le sort du pilote capturé est franchement risible ; il tente d’être pathétique (au sens « émouvant »), il n’est que pathétique (au sens « affligeant »), et les retrouvailles des deux presque-frères entrent dans le top 10 des rebondissements ridicules du cinéma.
Bref, le film ressemble un peu aux Chevaliers du ciel : un film pour les geeks, plutôt honnête quoique parfois tiré par les cheveux et manquant de moyens hors des vols en prise de vue réelle, et un film grand public bourré de ressorts foireux et de clichés éculés — le tout avec des acteurs qui passent les prises à se demander s’ils ont bien fermé le gaz en partant et s’ils doivent racheter du pain en rentrant.