Suburra
|de Stefano Sollima, 2015, ****
C’est l’histoire d’un député raisonnablement malhonnête qui, un soir, va comme d’habitude se taper une paire de putes arrosées de champagne et de cocaïne. Le petit soucis, c’est que l’une d’elles fait une overdose — et naturellement, elle est mineure, c’est pour ça qu’elle avait été embauchée. Le député se carapate, la pute survivante appelle une petite frappe pour régler le problème, et c’est là que toute la situation part en couille : le député est justement très bien placé pour faire passer une loi ouvrant un projet de casino local, largement soutenu par la mafia mais qui doit se dérouler sur un territoire détenu par la pègre tzigane, et sa mésaventure ne passe pas inaperçue. Entre les deux clans, le représentant local de la mafia romaine (qui trouve que l’agitation est mauvaise pour le business et tape sur les Italiens comme sur les Tziganes), les politiciens inquiets pour leur réélection et même un cardinal qui vient d’entendre Benoît XVI envisager la démission, tout s’emmêle et explose en quelques jours.
Les ingrédients sont classiques et piochent dans toutes les recettes du genre. La réalisation est sobre, directe, efficace, l’ambiance bien portée par des plans nocturnes et des intérieurs soigneusement composés — les séquences diurnes étant pour leur part moins esthétiques. Les acteurs font généralement leur travail avec soin (Giulia Gorietti a tout de même tendance à en faire un peu trop par moments), et Claudio Amendola est excellent dans toutes les scènes où on le voit — qu’il agisse en vrai politicien, largement plus soucieux de préserver l’intérêt commun que le député vendu à tout un chacun, ou en mafioso expérimenté chargé de liquider un problème local.
Le film s’adresse donc exclusivement aux amateurs du genre, mais pour ceux-ci il remplit le contrat sans faillir, rappelant un peu certains Melville et Marchal. C’est dur, c’est glauque, c’est triste, c’est cynique, c’est du bon polar mafieux bien costaud.