Chronicle

de Josh Trank, 2012, ****

Que feriez-vous si vous aviez brus­que­ment des super pou­voirs ? Le thème a été rebat­tu, trai­té dans tous les sens, du BCBG sauce Spider-man aux cas sociaux de Misfits en pas­sant par le « thanksss, ami­go » du boa que Harry lâche sur Dudley.

Grosso modo, le sché­ma récur­rent est le même : le héros découvre ses pou­voirs, apprend à s’en ser­vir en s’a­mu­sant plus ou moins, puis découvre que with great power come great res­pon­sa­bi­li­ties et s’en sert pour faire le bien en s’a­mu­sant plus ou moins.

Vu sous cet angle, Chronicle n’a rien d’original.

Techniquement, il reprend par ailleurs une recette qui n’est pas loin de l’é­cu­lé : le mon­tage de vidéos tour­nées par les pro­ta­go­nistes. La recette est utile pour les films « sur­vi­val », où elle est jus­ti­fiée par l’i­dée que per­sonne ne s’en tire et sur­tout pas toute une équipe de pro­duc­tion, et passe bien avec une uni­té de lieu et d’ac­tion ; en revanche, ici, il n’y a pas d’u­ni­té… Du coup, ce n’est pas le choix le plus cohé­rent, puisque ça oblige à faire venir un vidéaste ama­teur dans chaque scène qu’on veut mon­trer, quitte à se fader quelques séquence absurdes au pas­sage — non mais sérieux, mec, tu peux voler, pour­quoi tu veux emprun­ter la New Beetle de ta copine au camé­scope ? Oo”

Ceci dit, pour les geeks dans mon genre, c’est une nou­veau­té ori­gi­nale : jus­qu’i­ci, tous les films de ce genre se carac­té­ri­saient par un fil­mage trem­blo­tant et une image gra­nu­leuse, mal défi­nie et sans ges­tion aucune de la pro­fon­deur de champ. Ici, pla­ce­ment pro­duit Sony oblige, ça doit mon­trer à quel point un VG10, c’est de la balle : donc, l’i­mage est stable et propre, tout en res­tant « ama­teur », un équi­libre pré­caire qui fait pas très ciné­ma, mais marche pas trop mal. En revanche, ça rend pas vrai­ment jus­tice à l’Alexa uti­li­sée en réalité…

Malgré cette ouver­ture peu enga­geante, je consi­dère Chronicle comme une cer­taine réus­site. D’abord, parce que les per­son­nages sont assez bien construits : cli­chés ambu­lants à pre­mière vue (jus­qu’aux noms, d’ailleurs : je ne compte plus les films où le grand frère de ser­vice s’ap­pelle Matt et je crois que tous les Andrew doivent être mal dans leur peau), leur muta­tion révèle un second niveau direc­te­ment lié à leur per­son­na­li­té ini­tiale. Andrew, per­son­nage prin­ci­pal, est logi­que­ment le plus creu­sé, et le fait qu’il choi­sisse le côté obs­cur de la force est à la fois extrê­me­ment cohé­rent et suf­fi­sant pour don­ner un peu d’o­ri­gi­na­li­té au film.

Ensuite, pour les petits détails bien vus, notam­ment toutes les petites blagues inno­centes et plus ou moins adroites que les gosses font lors­qu’ils découvrent la télé­ki­né­sie. La petite sur­prise finale est éga­le­ment amu­sante, enfin, à sa manière.

Enfin, pour la décou­verte du vol et les scènes aériennes qui s’en­suivent, trai­tées de manière abso­lu­ment sublime et qui feront sali­ver le plus bla­sé des terriens.

Dans l’en­semble, on ne peut donc pas dire que Chronicle soit un grand film : il aurait pu être plus pro­fond, et mieux fil­mé si le par­ti pris de la vidéo n’a­vait pas été impo­sé sans réelle jus­ti­fi­ca­tion. Mais le scé­na­rio est réus­si, les per­son­nages aus­si, c’est assez amu­sant et très distrayant.