Cinéman

de Yann Moix, 2009, *

Un beau jour, une équipe de seconds rôles pètent un plomb. Au lieu de suivre le script, ils kid­nappent Sissi, jouée par Viviane Cook, et la retiennent pri­son­nière dans Pour quelques dol­lars de plus où ils jouent la bande de l’Indien. Leur vic­time n’a que le temps de lais­ser der­rière elle une broche qui per­met­tra au héros de la retrou­ver. Le pro­blème, c’est que ledit héros est prof de maths à Montreuil, et n’a pas vrai­ment la car­rure pour se glis­ser dans le cos­tume de l’homme sans nom : le sau­ve­tage capote lamen­ta­ble­ment et la pri­son­nière est emme­née dans un autre film…

L’idée est intrin­sè­que­ment mar­rante. Qui n’a pas ima­gi­né d’être pro­je­té dans un film ? Voilà de quoi ima­gi­ner moult détour­ne­ments de chefs-d’œuvre divers, comiques ou tra­giques, et une occa­sion unique de rendre hom­mage au ciné­ma en recons­ti­tuant des pans entiers de films — un peu comme l’a fait Ang Lee dans son Hôtel Woodstock, mais en plus varié et moins fidèle.

Et, de fait, il y a des moments où ça fonc­tionne à plein. La pre­mière appa­ri­tion de Dubosc en Eastwood ou le choc de la ren­contre d’Orange méca­nique et de Taxi dri­ver, par exemple. Le pro­blème, c’est ce qui se passe ensuite : oui, Dubosc peut avoir peur de Dujardin. Là où celui-ci excelle à jouer sur plu­sieurs registres — même s’il se laisse par­fois un peu trop enfer­mer dans le rôle de Chouchou ou Loulou, je sais plus —, celui-là ne connaît qu’un rôle, cari­ca­tu­ral, niais, pré­ten­tieux, libi­di­neux, bref, détes­table. Et pour un plan dont la sobrié­té for­melle rend hom­mage à l’œuvre d’o­ri­gine (j’ai déjà cité l’ou­ver­ture sur Pour quelques dol­lars de plus, j’a­jou­te­rai le géné­rique à la Buster Keaton et l’ap­pa­ri­tion de la rai­nette en tutu Robin des bois), on se tape dix minutes de ges­ti­cu­la­tions dubos­ciennes. Et quand par miracle il arrête une seconde de s’au­to-cari­ca­tu­rer, c’est pour lais­ser la place à un plan où Pierre-François Martin-Laval fait de même sur son propre registre.

Du coup, alors que l’i­dée pou­vait ame­ner un excellent méta-film hom­mage à la gran­deur du ciné­ma, on se far­cit une heure et demie de sketches des Robins des bois. Si on aime, pour­quoi pas, mais mieux vaut être prévenu.

PS : pour­quoi pas de réfé­rence à Jumanji ? C’eût été une mise en abîme inté­res­sante, non ?