Bienvenue à Zombieland
|de Ruben Fleischer, 2009, ****
Commençons par une remarque mitigée à l’égard du traducteur. D’une part, pourquoi avoir ajouté ce « bienvenue à » au titre original ? C’est un style ? Il avait déjà traduit Bienvenue à Gattaca (Gattaca tout court en version originale) et s’est dit que ça deviendrait sa signature ? Il a trouvé ça drôle ? Juste Zombieland aurait été très bien… Mais d’autre part, c’est la première fois depuis longtemps que je vois « penguin » traduit par « manchot » ; alors certes, une partie d’un gag repose sur la différence entre manchot et pingouin, mais saluons l’effort.
Gag ? J’ai dit gag ?
Ah, vous saviez pas que c’était une parodie de films de zombies ?
Ben vous le savez.
C’est aussi une parodie de road-movie, d’ailleurs, les deux genres n’ayant rien d’incompatible.
Le point de départ est simple : un geek polyphobe vivant dans World of Warcraft voit débarquer chez lui sa voisine de palier, stressée, qui vient d’être mordue par un clochard. Une heure plus tard, c’est elle qui tente de le mordre : c’est le premier contact du « héros » avec l’épidémie de zombification qui touche les États-Unis. Il fuit donc, bientôt seul humain normal, en suivant à la lettre des règles — comme dans un jeu de rôles, en somme — visant à survivre : le coup double (toujours remettre une balle dans un zombie pas tout à fait mort), la méfiance dans les toilettes, ne pas jouer au héros, la ceinture de sécurité…
Lorsqu’il rencontre une montagne de muscles qui se baptise Tallahassee — et qui appelle tous les survivants du nom de la ville où ils espèrent retrouver des proches, évitant ainsi l’attachement des noms — et a pour principe de foncer dans le tas avec toute arme potentielle trouvée en route, il pense faire un bout de route vers l’Est avant que leurs chemins se séparent ; mais ils se font détrousser par deux jeunes filles « sans défense », et une autre traque commence.
Assez classiquement pour le genre, on a ici plusieurs films en un. La lutte contre les zombies en est un, les rapports entre survivants (et en particulier entre Tallahassee et Columbus, le héros, et entre celui-ci et Wichita, l’aînée des voleuses) en est un autre. On trouve aussi un film à gags allant du très lourd (la passion de Tallahassee, qui consiste à chercher les derniers Twinkie avant leur péremption) au moyennement fin (la mort du regretté Bill Murray), en passant par quelques scènes étonnamment bien trouvées (le « relâchement de pression » dans une boutique, qui peut également être vue comme l’écho inversé des scènes de supermarché du Zombie de Romero). Bienvenue à Zombieland fait presque preuve de finesse psychologique dans quelques scènes, glissant sous les piques et les clichés quelques références bienvenues.
Cependant, il faut bien le dire, le scénario n’est guère épais. Le film compte sur le rythme, l’élégante caricature et la sobre exagération du jeu d’acteurs, une véritable fraîcheur narrative et un savant dosage de gore et de naïf pour séduire.
Du coup, le réalisateur a fait le pari de proposer un film très court — 1 h 20 —, sans s’obliger à délayer jusqu’aux sacro-saintes 90 minutes qui représentent le minimum syndical du moment ; mais je préfère un film marrant et sympa qui tourne bien en 1 h 20 à un film marrant et sympa qui tourne à vide de 1 h 54¹. Donc, j’ai passé seulement 1 h 20, mais 1 h 20 vraiment sympa.
¹ Toute ressemblance avec le Morse de Tomas Alfredson serait purement volontaire.