La route
|de John Hillcoat, 2009, ****
Ils sont deux : le père, le fils. Et ils marchent vers le sud, vers la côte, où ils espèrent échapper à la grande chavanassa — après une explosion d’origine inconnue, un hiver sans fin a envahi leur région. Les rares autres survivants sont généralement hostiles, les ressources étant limitées et chacun livré à lui-même.
Au-delà de ce simple exposé des faits, difficile de décrire La route. Imaginez le fils naturel de Malevil, de Hombre et du Guerrier de la route, et vous aurez une idée. Mais ici, point de romantisme à la Mad Max, ni de société à reconstruire comme chez Merle ; on est juste dans un univers profondément hostile et l’on suit deux personnages qui tentent de s’en tirer. Avec rapidement cette idée obsédante : qu’est-ce qui sépare les humains qu’ils sont des autres, ceux qui les chassent pour les manger ? La paranoïa guette, la remise en question aussi — car le fils, aussi différent que soit l’environnement, est à l’âge où l’on commence à prendre du recul sur les affirmations de ses parents. L’espoir et, surtout, la perte d’espoir aussi sont omniprésents.
Il y a là-dedans, outre une ambiance extrêmement oppressante malgré les grands espaces photographiés (le film a été tourné en Oregon et en Louisiane notamment), quelques petites trouvailles puissantes. Le trajet intérieur du fils et la façon dont il va discrètement se préparer au retournement final, l’obsession générale sur la peur d’être suivi, le passage extrêmement ponctuel d’un animal… Tout repose sur le jeu des acteurs, heureusement totalement irréprochable de bout en bout, et sur un scénario fait de langueur (principale faiblesse sans doute de l’œuvre) et de psychologie discrète.
En tout cas, c’est très, très fort, et pas mal dérangeant.