Red Sparrow
|de Francis Lawrence, 2018, *
Du lac des cygnes à l’école des moineaux : tel est le parcours de Choupette, danseuse étoile du Bolchoï stoppée par une fracture, qui est envoyée par son oncle Trèsméchant dans une école d’agents secrets.
Soyons clair : ce film a un intérêt et un seul. Il fait définitivement entrer Jennifer Lawrence dans l’âge adulte et la détache radicalement des Hunger games, même dans l’esprit de ceux qui ont raté Winter’s bone et Silver linings playbook. Accessoirement, comme ce dernier, il confirme l’évolution d’Hollywood : là où, il y a quelques années, une femme normalement bâtie était « attirante malgré tout » (le syndrome Bridget Jones en somme), il est désormais totalement autorisé de la présenter comme « attirante tout court ».
Pour le reste…
Ô mon Dieu, que c’est nul !
Je vais juste relever un petit truc qui vous donnera le niveau du scénario : Matrone, la vilaine cheftaine de l’école des moineaux, dit très clairement et à plusieurs reprises que la désobéissance, dans cette annexe du KGB, c’est un aller simple pour aller nourrir les cochons — et pas en leur apportant des seaux. Choupette, elle, elle fait quoi ? Elle désobéit, d’un bout à l’autre bien sûr. Elle pourrit la moitié des cours, ouvre sa gueule quand on lui dit de la fermer, ferme les jambes quand on lui ordonne de les écarter, et au lieu de finir dans le bortsch des officiers ou d’être envoyée dans un bordel de soutien aux travailleurs du camp 333, elle reçoit son diplôme et file sur le terrain.
Alors après ça, elle peut bien se taper tous les espions américains qu’elle veut, en tomber amoureuse, les rendre amoureux, s’associer avec pour baiser son oncle ou les baiser pour le compte de son oncle, comment dire… On aura du mal à faire plus incohérent.
Du coup, malgré des acteurs qui font ce qu’ils peuvent, une réalisation soignée, des décors splendides, ben ça prend pas. C’est juste nul, non seulement irréaliste, mais profondément incohérent. Relisez Bouche du diable, revoyez les James Bond de la grande époque, feuilletez Le goulag même, vous y verrez des espions soviétiques plus crédibles qu’ici — sans même parler de The Americans, qui vient de se terminer et dont les dix minutes les moins réussies sont plus solides que l’ensemble de ce film.