Lucy
|de Luc Besson, 2014, *
Luc Besson, on dit ce qu’on veut, ça a été un grand cinéaste. Il avait une certaine capacité à l’épique (Le grand bleu, par exemple), un goût prononcé pour l’action impeccablement rythmée (Léon, Le cinquième élément), une grande capacité à mélanger personnages vaguement puérils touchants (Jacques, Mathilda ou Leeloo), tarés magiques (l’homme aux rollers, Stansfield, Ruby, Saint-Hubert) et anti-héros déprimants (Korben et Léon bien sûr). Il savait également saupoudrer ses films d’un chouïa de métaphysique et d’émotion, sans en faire des tonnes non plus, et quelques scènes restent marquées dans ma mémoire de maniaque (la discussion entre Jacques et Johanna à la sortie de l’hôpital, quand « tonton Bob » rencontre Marco chez Nikita, Mathilda parlant de sa famille, « elle est vraiment… parfaite, oui, je sais », entre autres) ; et c’était un directeurs d’acteurs assez magistral, capable de faire sortir à Natalie Portman sa meilleure performance jusqu’à Black swan. Besson était toujours à deux doigts de basculer dans l’action débile, à un fil de s’effondrer dans le sirupeux, à ça d’aller trop loin dans la caricature, mais le résultat marchait parfois formidablement.
Ben ce fragile équilibre, faut être honnête : Besson l’a perdu.
Malgré un postulat de base au ridicule achevé (le réalisateur-producteur-scénariste le reconnaît lui-même, même s’il le dit pas comme ça), Lucy démarre bien. Il tourne comme un coucou suisse, avec de l’action comme il faut et un montage nerveux à souhait, et les acteurs font leur boulot (même s’il manque un Gary Oldman quelque part).
Mais la fin…
La fin s’embourbe dans une polenta symbolique niaise et pesante, sorte de resucée ratée du finale imbitable mais grandiose de 2001, l’odyssée de l’espace, et le message sur l’ignorance et la connaissance est asséné de manière particulièrement lourdingue. Cette dernière masturbation du scénariste finit par mettre à bas le bel édifice de thriller fantastique que le réalisateur avait mis une heure à construire et, d’une certaine manière, c’est tout le film qui disparaît dans les dernières scènes, à l’instar de son personnage principal.