Agent Carter
|de Stephen McFeely et Christopher Markus, depuis 2015, ***
Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, l’univers des agences d’espionnage, de contre-espionnage ou de sécurité intérieure est en plein bouleversement : la course aux savants nazis bat son plein, l’allié d’hier devient l’ennemi soviétique du jour, tout ce qui n’est pas américain est soupçonné d’être un agent rouge infiltré. Dans ce maelström de doutes, il reste un pilier de certitude : on est entre hommes — une femme, c’est fait pour apporter le café, filtrer les appels et taper le courrier, enfin, qui trouverait autre chose à faire avec ?
À la Réserve scientifique stratégique (SSR), il y a pourtant un bouleversement de trop. Nommée agent pendant la guerre, Peggy Carter a conservé cette idée curieuse que puisqu’elle a un badge, son travail devrait être le même que celui des autres agents : enquêter sur les armes secrètes, trouver des scientifiques, assurer la sécurité du monde libre, tout ça. Et ceci, alors que non contente d’être une femme, elle est anglaise, donc suspecte d’espionnage, au mieux au profit des alliés, éventuellement pour l’ogre russe.
Il y a une chose sympa dans Agent Carter : on a rarement l’occasion de voir un scénario (relativement) féministe dans les années 40. Confrontée au machisme sous toutes ses formes, des plus ouvertes et grasses aux plus insidieusement paternalistes, l’agent Carter s’en sort généralement lorsqu’elle affronte un homme et ne se fait vraiment avoir que par une autre femme.
La série a d’autres qualités, comme des personnages variés, généralement plutôt bien construits, et une vision amusante des chocs culturels entre Britanniques et Américains. La version d’Howard Stark qui y est présentée, véritable caricature d’Howard Hughes, est également plutôt réussie.
Elle a pourtant deux faiblesses : un rythme inégal et une certaine mollesse dans certains épisodes, et surtout un scénario finalement très sage, moral et limite prévisible. Par exemple, l’utilisation du psychiatre est une vraie réussie, mais plutôt que de l’utiliser comme un élément de suspense, les auteurs ont préféré la rendre évidente quasiment dès son apparition, limitant grandement les enjeux autour du personnage.
Pour résumer, l’ensemble est tout à fait regardable, mais pas bouleversant et un net ton en dessous d’autres productions Marvel récentes.