Demolition
|de Jean-Marc Vallée, 2015, ****
Aujourd’hui, ma femme est morte. Ou peut-être hier, je ne sais plus.
Voilà, en deux phrases, le personnage interprété par Jake Gyllenhaal, qui poursuit donc son exploration des gens qui ont une case brinquebalante à l’intérieur du crâne — après celui qui filmait la mort pour devenir riche, celui qui était obsédé par son sosie ou même celui qui vivait pour un jour tirer une balle. On pourrait voir dans le film une morale façon « chaque deuil est unique », mais en vérité il paraît bien plus centré sur une toute autre question : « qui suis-je si je ne ressens rien ? »
Souvent à deux doigts d’en faire trop, Bryan Sipe arrive tout de même à relancer régulièrement son scénario en le réorientant au moment où ça allait devenir lourd. Ça n’empêche pas certains moments un peu caricaturaux (par bonté d’âme, j’éviterai de détailler mon avis sur la révélation du gamin au Bricomarché local), mais le casting parvient sans peine à les faire passer trente secondes avant que l’angle d’observation soit bouleversé pour reprendre la démolition / reconstruction des personnages d’une autre manière.
Le résultat n’est, soyons honnête, pas inattaquable. Mais la prestation des acteurs est extraordinaire, les personnages sont touchants dans leurs névroses diverses et le rythme excellemment géré vous emmène sans vous laisser décrocher. Au bout du compte, cette plongée dans les tares de personnages paumés est très agréable.