Pain & gain
|de Michael Bay, 2013, ****
Michael Bay a une qualité : la constance. Bad boys, Armageddon, Pearl Harbor, Transformers, Transformers : la revanche, Transformers : la face cachée de la Lune, tout ça repose sur les mêmes ficelles (des biceps, des explosions, une dose d’humour bas de plafond et une paire de seins) et la principale difficulté du critique est de varier les tournures pour ne pas se répéter. Cependant, il y a débat chez certains, vu que le premier film de Michael Bay, Rock, était loin d’être une bouse : y a‑t-il un second degré chez Michael Bay ?
Et bien, je parie que Pain & gain¹ fera couler de l’encre quand, dans quarante ans, on écrira des livres sur la filmographie de Michal Bay.
La base ? Trois types plus musclés qu’intelligents kidnappent un millionnaire et lui font signer un don de tous ses biens. Pendant qu’ils profitent des voitures, des villas et des filles, le millionnaire recrute un détective pour les retrouver. Dans la bande-annonce, y’a Mark Wahlberg qui court, des flics du SWAT qui descendent d’un fourgon au ralenti, une bombe en maillot de bain, Ed Harris qui résume la situation, une bombe qui se fait couler du champagne sur le soutien-gorge, Dwayne Johnson, une Lamborghini, Mark Wahlberg qui crie, une voiture qui explose, bref, dans la bande-annonce, y’a tout un film de Michael Bay résumé.
Et puis, il y a le film. Et le film est, comment dire… Très différent de la bande-annonce. La première chose remarquable sur les héros est leur stupidité, la deuxième, leur foi inébranlable que le rêve américain, c’est qu’on peut devenir riche en faisant de la muscu. On voit peu les flics, y’a deux explosions en tout et pour tout, et chaque scène d’action est méthodiquement tournée en parodie. Car c’est, profondément, ce qu’est Pain & gain : une parodie. Des personnages convaincus qu’on peut vivre comme dans un film de Michael Bay se foutent dans une merde noire parce qu’ils sont cons. Le pire, c’est que c’est inspiré d’une histoire vraie, et là aussi Michael Bay fait un effort de second-degrétisation : au moment où tout un chacun se dit « non, c’est pas possible, c’est vraiment trop gros », un panneau vient rappeler que « c’est toujours une histoire vraie ».
Bien sûr, il y a quelques aménagements par rapport à la réalité, mais le choix de raconter cette histoire est un gros retournement pour Michael Bay : d’un coup, son obsession pour les biceps et le patriotisme un peu saoulant de ses films sont retournés comme exemplaires de crétinerie, des gens qui regardent ses films au premier degré (« I watched a lot of movies, I know what I’m doing ») sont des abrutis finis, la bimbo décérébrée inspirée de la réalité est encore plus bimbo et encore plus décérébrée que les pouffes de Transformers et les plus gros seins du film ont une vraie utilité.
À côté de ça, Pain & gain est une comédie farfelue très bête, déjantée, rythmée malgré une ou deux faiblesses occasionnelles de montage. C’est très ordinaire en tant que film, mais amusant et distrayant. Ce qui, quand on parle de films de Michael Bay, est déjà un énorme compliment.
¹ Nous sommes sans nouvelle du Comité anti-traductions foireuses. Il paraît que ses membres ont été hospitalisés après avoir vu écrit « No pain no gain » sur l’affiche française.