Ava

de Léa Mysius, 2017, *

Il y a dix-huit ans sor­tait Mauvaises fré­quen­ta­tions, l’his­toire d’une ado­les­cente ordi­nai­re­ment bla­sée qui découvre la musique, l’a­mi­tié et l’a­mour, et finit par se pros­ti­tuer pour se payer un voyage avec son copain. Il avait été troi­sième au box-office gre­no­blois la semaine de sa sor­tie et, comme tous mes voi­sins, j’é­tais allé le voir parce qu’on n’a pas tous les jours l’oc­ca­sion de voir sur un grand écran les rues où on passe tous les jours. À part ça, c’é­tait assez pauvre, sim­pliste, heu­reu­se­ment pas trop pré­ten­tieux (rien à voir avec le très sur­co­té Jeune & jolie) mais fran­che­ment pas une grande réussite.

Les meilleures scènes sont celles où Ava se confronte à sa vision défaillante, réa­li­sant par exemple que son champ visuel s’est encore réduit… — pho­to Bac Films

Ava rap­pelle furieu­se­ment Mauvaises fré­quen­ta­tions. Comme lui, il évite de péter plus haut que son cul mais, comme lui, il ne raconte fina­le­ment pas grand-chose d’autre que la chute d’une ado pau­mée (l’ar­gu­ment ici étant qu’elle souffre d’une réti­nite pig­men­taire fou­droyante) qui s’ac­croche au mau­vais gar­çon et plonge dans la délin­quance. Comme lui, il est sou­vent mal­adroit, comme lui, il pro­fite d’une bonne actrice pour le pre­mier rôle mais d’un reste de cas­ting assez inégal, comme lui, il est empli de cli­chés sur l’adolescence.

Hélas, Ava a un défaut majeur sup­plé­men­taire : il ne se contente pas de cli­chés sur l’a­do­les­cence. Il y ajoute des cli­chés sur les gitans, vague­ment mal­hon­nêtes, géné­ti­que­ment inca­pables de s’a­dap­ter à la bonne socié­té, vivant sus­pi­cieu­se­ment entre eux en mariant des gamines de seize ans ; il reprend éga­le­ment quelques idées reçues sur les mères céli­ba­taires, for­cé­ment indignes, qui ont eu une sexua­li­té pré­coce et s’en­voient en l’air avec n’im­porte qui qua­si­ment sous les  yeux de leurs enfants.

Ajoutons éga­le­ment une fai­blesse du script : Ava est mau­vaise, méchante d’o­ri­gine. Là où même Mauvaises fré­quen­ta­tions avait com­pris qu’il est plus inté­res­sant de nar­rer la trans­for­ma­tion d’une gen­tille fille en connasse d’a­do, nous voi­là aux prises avec un per­son­nage « noir » qui va fina­le­ment juste assu­mer sa vraie nature. Il y a donc là un enjeu de moins, ce qui n’en laisse pas des masses.

…mais le gros du film, c’est Mauvaises fré­quen­ta­tions qui se prend pour Thelma et Louise, avec de la nudi­té ado­les­cente pour atti­rer l’at­ten­tion. — pho­to Bac Films

Finalement, je vais le dire puisque per­sonne ne le fera : la prin­ci­pale chose remar­quable de ce film, c’est qu’on y voit une gamine de treize ans à poil sous tous les angles (jouée par une actrice majeure, bien enten­du). Mais si vous n’a­vez pas de ten­dances hébé­philes mal digé­rées, vous n’a­vez aucune rai­son de consi­dé­rer ça comme autre chose qu’un empi­le­ment de cli­chés plu­tôt mal­adroit, à peine rehaus­sé de quelques scènes sym­pa et d’un pre­mier rôle bien interprété.