La momie

d’Alex Kurtzman, 2017, *

« La loi salique, c’est mal. » Tel est le mes­sage fon­da­men­tal de cette œuvre inou­bliable, qui repose sur l’i­dée qu’une héri­tière, pri­vée d’hé­ri­tage par la nais­sance tar­dive d’un frère, décide de se ven­ger en mas­sa­crant tout le monde et en cher­chant à faire régner son Élu.

Parce que oui, même sur­en­traî­née, dési­gnée par les dieux égyp­tiens, ven­due à Seth lui-même, Mamine ne pour­rait pas régner sans un mâle à ses côtés, c’est bien connu. C’est tout le pro­blème de la place des femmes au ciné­ma amé­ri­cain : un pas en avant (la loi salique c’est mal), un pas en arrière (j’ai besoin de mon Élu).

Vous vou­liez des hié­ro­glyphes ? Voilà des carac­tères genre phé­ni­ciens. Ah ah, vous vous atten­diez pas à ça, hein ? — pho­to Universal Pictures

Je vais pas comp­ter les absur­di­tés, d’a­bord parce que je sais pas comp­ter jusque là, ensuite parce que ça revien­drait à vous racon­ter le film seconde par seconde. J’avais plus vu un crash d’a­vion aus­si bien fichu depuis, oh, l’Antonov de Fast & furious 6, je dirais ; j’a­vais plus vu d’his­toire de fan­tôme conseiller aus­si sub­tile depuis Always ; j’a­vais plus vu de roman his­to­rique aus­si solide depuis Da Vinci code ; et bien sûr, j’a­vais plus vu de reine malé­fique en images de syn­thèse aus­si royale, malé­fique et syn­thé­tique depuis Suicide squad.

Faites pas gaffe à cette scène, elle n’est même pas cen­sée faire sem­blant de ten­ter d’être vague­ment cré­dible. — pho­to Universal Pictures

On est à deux pas de l’ac­ci­dent indus­triel, quoique non, en fait, vu le niveau de cer­tains rebon­dis­se­ments, on est en plein dedans. Mais ce truc qui par­tait bien pour deve­nir un bon gros troll bien hila­rant a une petite fai­blesse : l’i­dée de réin­jec­ter Dr Jekyll et Mr Hide n’est non seule­ment pas mau­vaise, mais pas ratée. Beaucoup par la grâce de Russell Crowe, d’ailleurs. Oui, ça me fait bizarre, je viens de dire du bien d’un des rares acteurs que je tienne pour capable de concur­ren­cer Brendan Fraser. Peut-être est-ce parce que le reste du cas­ting a été recru­té dans une huî­trière et que la direc­tion d’ac­teurs a été confiée au sia­mois obèse de votre voi­sine de quatre-vingt-huit ans, je sais pas ; mais Russell s’en sort bien dans son double rôle de savant fou au ser­vice de l’ar­mée, quand Tom n’en finit plus de jouer Maverick en pilo­tage auto­ma­tique, quand Sofia compte sur les effets spé­ciaux pour mas­quer son talent d’ac­trice, quand Jake n’en peut plus de décli­ner le même éter­nel side­kick et quand Annabelle s’embourbe en blonde-bon­nasse-brise-burne de service.

Dieu mer­ci, Russell Crowe ne suf­fit pas à sau­ver le film, qui se résume en gros à la fusion d’un Allan Quatermain et de Suicide squad. On peut donc, pour conclure, écrire serei­ne­ment : « mmmmh, c’est presque aus­si bon que La tombe de l’empereur dra­gon, tiens ! »