Smashing machine

de Benny Safdie, 2025, ****

À la fin des années 90, le MMA n’est pas encore le sport recon­nu et codi­fié qu’il est deve­nu. Mais il com­mence à drai­ner les foules, notam­ment au Japon. Lutteurs, boxeurs, jiu-jit­su­kas et autres com­bat­tants des États-Unis, de Russie, du Brésil et d’ailleurs se retrouvent donc régu­liè­re­ment à Tokyo ou à Yokohama pour les tour­nois « Pride ». Parmi ces machines à baffes, Mark Kerr, 1,91 m, autour de 115 kg, ancien lut­teur olym­pique souf­frant d’une petite amie instable et d’une addic­tion aux antidouleurs.

Voilà le point de départ de Smashing machine, un bio­pic qui parle un peu d’arts mar­tiaux mixtes, un peu d’en­traî­ne­ment spor­tif et de ges­tion de car­rière, un peu de couple et beau­coup des effets secon­daires des opioïdes, anti-inflam­ma­toires et consorts.

Dwayne Johnson levant une ceinture de champion devant les applaudissements
Eh, vous avez vu ? J’ai des che­veux ! — pho­to Zinc

Un truc est abso­lu­ment remar­quable : Dwayne Johnson. Déjà, il a des che­veux, ce qui suf­fit à le rendre tota­le­ment mécon­nais­sable (okay, y’a aus­si du maquillage, notam­ment après les com­bats, vu que Kerr a pris son lot de coups après la Pride 7, qui est le pre­mier tour­noi du film). Ensuite, il joue bien. Ce n’est pas tota­le­ment une sur­prise pour ceux qui ont été atten­tifs pen­dant les quelques scènes dra­ma­tiques éparses de Pain and gain et de Hobbs et Shaw ou qui ont noté sa capa­ci­té à gérer une touche de second degré dans Rampage, mais ça lais­se­ra pan­tois ceux qui connaissent les innom­brables œuvres qui ont misé sur son phy­sique sans aller plus loin. Dwayne a une paire de scènes à fleur de peau, quelques cra­quages vrai­ment émou­vants, et c’est sans doute son pre­mier film de vrai acteur.

Bon, après, c’est la seule pres­ta­tion vrai­ment remar­quable. Déjà, Blunt est la seule autre actrice du géné­rique, elle n’a plus rien à prou­ver depuis au moins Sicario, et ça tombe bien : elle ne prou­ve­ra rien ici, son per­son­nage instable et ses revi­re­ments constants étant trop dés­équi­li­brés pour juger l’ac­trice. Le reste du cas­ting est com­po­sé de cat­cheurs, de lut­teurs, de boxeurs, de judo­kas et d’autres trucs du genre, et si tout le monde fait son bou­lot avec appli­ca­tion, c’est pas en jouant gros­so modo eux-mêmes (voir car­ré­ment eux-mêmes, comme Bas Rutten) qu’ils vont se faire admirer.

Dwayne Johnson et Emily Blunt dans les bras l'un de l'autre
Des fois, on est contents, des fois, on se fait des mamours, des fois, on s’en­gueule, jamais le spec­ta­teur sait vrai­ment pour­quoi. — pho­to Zinc

Côté tech­nique, Smashing machine est réus­si sans excès. La pho­to est propre et dépour­vue de réelle ins­pi­ra­tion, le mon­tage est entraî­nant et ryth­mé sans être épous­tou­flant, la réa­li­sa­tion est soi­gnée mais pas flam­boyante. Le scé­na­rio est assez fidèle à l’Histoire, mais s’en écarte ponc­tuel­le­ment quand les aspects ciné­ma­to­gra­phiques le jus­ti­fient, sans ver­ser dans l’at­ten­tat historique.

Bref, c’est de la série B de qua­li­té. Ça se regarde avec plai­sir, c’est effi­cace et entraî­nant, mais à part la pres­ta­tion de Johnson dans un vrai rôle dra­ma­tique (qui lui per­met d’ac­cro­cher de jus­tesse sa qua­trième étoile), c’est un bon moment peu mémorable.