Argo

de Ben Affleck, 2012, ****

Monter un faux film pour pou­voir entrer en Iran et en exfil­trer six diplo­mates amé­ri­cains, dans les semaines sui­vant la chute du Shah : l’i­dée est sau­gre­nue, le genre d’i­dée tor­due que seul un scé­na­riste d’Hollywood peut avoir… Sauf qu’un mec de la CIA l’a vrai­ment eue, et que ça a marché.

Historiquement, Argo est for­te­ment roman­cé : la trame glo­bale est sim­pli­fiée, des embûches sont ajou­tées à la fin — y com­pris une scène pas très loin du ridi­cule, où un « jum­bo » décolle sans semer les voi­tures lan­cées à ses trousses : a prio­ri, Vr pour un 747 est de l’ordre de 160 nœuds, donc ils ont dû mettre de sacrés moteurs dans leurs caisses. Il reste cepen­dant assez bien fou­tu pour rendre la réa­li­té d’un pays entre deux ères, dans les temps incer­tains où un moder­nisme pilo­té par les États-Unis laisse la place à un repli reli­gieux et où rien ne dis­tingue clai­re­ment les bonnes volon­tés des balances.

L’ambiance est pre­nante, incer­taine et, même si l’on sait que les six diplo­mates ont effec­ti­ve­ment retrou­vé les États-Unis, on se prend à se deman­der com­ment et pour­quoi : à ce niveau, le contrat est rempli.

Les acteurs font aus­si un bon bou­lot, et cer­tains retour­ne­ments sont bien trou­vés — « Je viens tour­ner un film en Iran, bien sûr je parle far­si » — et tombent au moment opportun.

Si le film a une fai­blesse, c’est du côté de la réa­li­sa­tion qu’il faut la cher­cher, et encore : bien ryth­mé, pro­fi­tant d’une vraie ambiance, il n’y a pas grand-chose à lui repro­cher, juste l’ab­sence d’un « petit quelque chose » qui la ferait vrai­ment sor­tir du sta­tut de tra­vail appli­qué et efficace.

C’est donc un film de poli­tique-fic­tion et presque d’es­pion­nage, lar­ge­ment his­to­rique, bien joué et réa­li­sé pro­pre­ment, glo­ba­le­ment très agréable à regarder.