Insaisissables 2

de Jon Chu, 2016, *

Vous le savez sans doute, je suis plus pho­to que vidéo. En fait, je puis fil­mer des choses, plus ou moins, mais alors que je sais sélec­tion­ner des images ou les assem­bler pour faire une série auto­nome qui raconte une his­toire, je suis inca­pable de coor­don­ner des plans ani­més, de trou­ver un rythme, de les faire coha­bi­ter pour dire quelque chose. Et bien que je sache écrire en géné­ral (c’est quand même mon métier), je suis inca­pable d’é­crire pour l’i­mage ani­mée : si je devais faire un scé­na­rio, je ne sau­rais pas par où com­men­cer, et les rares fois où j’ai ten­té à l’ap­proche d’une inter­view d’an­ti­ci­per ce que je vou­lais fil­mer, dans quel ordre et pour dire quoi, ça n’a rien donné.

Tout ça pour dire que si je ne filme pas, c’est parce que j’ai une qua­li­té : je connais mes limites.

C’est exac­te­ment le pro­blème de Jon Chu : il est mau­vais, mais il ne le sait pas. Du coup, il ose reprendre un polar à clefs, Insaisissables, qui uti­li­sait l’illusionnisme à la fois comme matière et comme méta­phore, et qui était fran­che­ment réus­si grâce à un scé­na­rio plu­tôt malin.

Vous avez vu mon scénario ? Il est bon hein ? Vous voyez que je peux écrire seul ! - photo SND
Vous avez vu mon scé­na­rio ? Il est bon hein ? Vous voyez que je peux écrire seul ! — pho­to SND

Mais cette fois, sur les trois scé­na­ristes du pre­mier film, les deux qui avaient créé les per­son­nages ont dis­pa­ru — ça doit être une coïn­ci­dence. Du coup, on se retrouve avec une his­toire d’ac­tion répé­ti­tive qui retente le coup du retour­ne­ment final, sauf que celui-ci réus­sit à être à la fois sur-annon­cé et inco­hé­rent : on est très loin de l’é­lé­gance bour­rée de faux-sem­blants du pre­mier opus. Jon Chu tente d’a­mé­lio­rer les choses en jouant sur la réa­li­sa­tion et le mon­tage, mais comme il n’a aucun talent, il ne réus­sit qu’à mon­trer l’ef­fet d’une colique néphré­tique sur un lapin Duracell : ça vibre dans tous les sens, mais c’est illi­sible, les scènes suc­ces­sives se res­semblent sans se renou­ve­ler, ça ne s’ar­rête jamais et le sen­ti­ment domi­nant à la fin du film est un pur soulagement.

PS : On note­ra en pas­sant que la tra­duc­tion est par­fai­te­ment au niveau du film. J’ai noté une ou deux erreurs en route et, sur­tout, « œil » est écrit « oeil » tout au long des sous-titres, ce qui mérite d’être condam­né à voir le film en boucle jus­qu’à ce que mort s’en­suive.