Tortues ninja¹

de Jonathan LIebesman, 2014, O

Y’a des trucs, on va les voir juste par curio­si­té, parce qu’on avait pile l’âge de regar­der ça à l’é­poque où ça pas­sait dans Amuse 3². Et que même si on trou­vait déjà ça vague­ment idiot, c’é­tait dis­trayant. Et que vingt ans plus tard³, on se demande si les made­leines sont le gâteau à pâte molle déli­ca­te­ment par­fu­mé de vanille et de can­nelle que fai­sait ma mère ou le truc bour­ra­tif et sans saveur qu’on gri­gnote entre deux trains parce que c’est tout ce qu’on a pour 1 € à la SNCF de nos jours.

Je sens que je m’é­gare. Revenons à nos mou­tons. Enfin, à nos tor­tues. Les tor­tues nin­ja. À la base, c’é­tait cré­tin (faut dire que le comics ini­tial était une paro­die), fun, agi­té, par­fois mar­rant, et tou­jours débile.

Deux bonnes décen­nies plus tard, qu’en reste-t-il ? C’est cré­tin, agi­té, et débile.

Le fun et le mar­rant ont été pom­pés par l’ab­sence totale d’o­ri­gi­na­li­té du nou­veau scé­na­rio : April connaît les tor­tues depuis l’é­poque où elles étaient des vraies tor­tues, elle est la fille du scien­ti­fique qui a conçu le muta­gène, elle leur a sau­vé la vie, tout ça. Autrement dit : tout tourne autour d’elle, les tor­tues deviennent secon­daires. C’est pas Tortues nin­ja, c’est Reporter kami­kaze, en fait. Du coup, ça en fait des tonnes dans le pathos — mon père ce héros, le vilain patron de mon gen­til pôpa, le sort inique qui condam­nait les gen­tils ani­maux de labo­ra­toire, l’hé­roïsme de la fillette, tout ça. Lourd, lourd, triple lourd.

C’est évi­dem­ment joué avec les pieds (plus je vois Megan Fox, plus je pense que Transformers res­te­ra le point haut de sa car­rière), logi­que­ment extrê­me­ment laid (avec une men­tion spé­ciale pour l’ar­mure de Shredder, abso­lu­ment ridi­cule), et le scé­na­rio tient sur une feuille de papier hygié­nique — et une fois virés les trucs lour­dingues sur April et son pôpa et la vilaine mul­ti­na­tio­nale, vous pou­vez vous conten­ter d’un quart de feuille.

Reste une chose réus­sie : le mon­tage. Nerveux, pas trop épi­lep­tique pour autant, le film est ryth­mé et plu­tôt entraînant.

Bref, ça vous bou­sille les neu­rones, mais comme ça masse le cer­veau en même temps, c’est presque indolore.

PS : y’a quand même un truc qui m’a cho­qué, c’est le camé­scope Bluetooth en 1999. La spé­ci­fi­ca­tion BT 1.0 venait d’être publiée, ce n’est qu’en 2000 que les pre­miers pro­duits BT sont arri­vés sur le mar­ché (télé­phones et oreillettes), et on n’a pas vu d’ap­pa­reils pho­to ou de camé­ras BT pen­dant encore quelques années, donc ça s’ap­pelle un ana­chro­nisme. Merci à la production.

¹ Le Comité anti-tra­duc­tions foi­reuses consi­dère que la moindre des choses, quand on adapte une fran­chise, c’est de res­pec­ter les tra­duc­tions déjà effec­tuées : le titre fran­çais est Tortues nin­ja depuis son appa­ri­tion sur Canal +.

² Oui, j’ai connu Amuse 3. Et alors ? Sale jeune, va.

³ Oui, d’ac­cord, vingt-trois ans plus tard, et donc ?