Prisoners

bijou de Denis Villeneuve, 2013

Sur le papier, un polar cen­tré sur un kidnapping.

À l’é­cran, une œuvre psy­cho­lo­gique sur la dou­leur, la folie, le sang-froid, la jus­tice et le sadisme.

Plus que les kid­nap­pées, que l’on voit fina­le­ment assez peu, le titre fait avant tout réfé­rence aux parents et aux forces de l’ordre, pri­son­niers de leurs pré­ju­gés, de leur concep­tion du monde et de la jus­tice, de leurs impres­sions, de leurs sen­ti­ments, de leurs cer­ti­tudes. Et, en par­ti­cu­lier, à un père « cou­ra­geux » enfer­mé dans une peur panique d’ad­mettre son impuis­sance et de remettre en cause ses convic­tions, mal­gré des preuves de plus en plus fla­grantes de son erreur ini­tiale. L’ensemble forme une réflexion assez réus­sie sur la jus­tice, l’en­quête de police, les rap­ports et la confiance entre poli­ciers et citoyens, la famille et les res­pon­sa­bi­li­tés qui vont avec… ain­si que la reli­gion et la façon dont la foi aveugle peut sou­te­nir la rage.

Des acteurs impec­cables, une pho­to magni­fique, un scé­na­rio super­be­ment construit en faux-sem­blants suc­ces­sifs, des dia­logues soi­gnés, une dure­té omni­pré­sente et un réa­lisme frap­pant — voire ger­bant, lors­qu’il s’a­git de per­son­nages tabas­sés, avec des maquillages criants de véri­té qui ont heur­té plu­sieurs spec­ta­teurs dans ma salle.

L’ensemble est gla­çant, retour­nant, ter­rible, à voir… si on a le cœur assez bien accro­ché pour l’apprécier.