The purge¹

de James DeMonaco², 2013, **

Plutôt que d’a­voir des emmer­de­ments toute l’an­née, le gou­ver­ne­ment a choi­si : la pre­mière nuit du prin­temps, de 19h à 7h, tous les crimes sont dépé­na­li­sés. C’est la nuit de tous les dan­gers, celle où tous les êtres humains peuvent se défou­ler et se lais­ser aller à leurs pul­sions. Ainsi, soi­gneu­se­ment déten­dus par une nuit de vio­lences, les gen­tils Américains peuvent vaquer paci­fi­que­ment à leurs occu­pa­tions le reste de l’an­née — et, au pas­sage, les gens sans défense, clo­dos, malades et autres impro­duc­tifs auront vu leur popu­la­tion bru­ta­le­ment réduite.

Le point de départ est un peu ori­gi­nal, mais juste un peu : l’homme est natu­rel­le­ment un pré­da­teur, il faut don­ner une échap­pa­toire à ses ins­tincts, c’est pas nou­veau. Là où c’est un peu plus inté­res­sant, c’est sur la cri­tique de la socié­té amé­ri­caine, où tout ce qui est exté­rieur est vécu comme angois­sant ou dan­ge­reux alors que le mal vient sou­vent de l’in­té­rieur ; sur la ques­tion du monstre tapi dans les gens ordi­naires et bien-pen­sants ; ou sur l’é­vo­lu­tion ultime où, fina­le­ment, le plus autiste, celui qui ne voit même plus le monde à tra­vers une meur­trière mais car­ré­ment dans un casque de réa­li­té vir­tuelle, est celui qui est le plus tour­né vers l’autre.

Ça ne va hélas guère plus loin, par la faute d’un scé­na­rio hyper-conve­nu et vague­ment mora­li­sa­teur, de per­son­nages qu’on a tous envie de voir morts, de réac­tions à l’ab­surde ache­vé (« oh, Papa, t’as tué mon petit copain. Je te hais. Mais je t’aime quand même, hein. »), d’un éton­nant pas­sage sous silence du viol (au moins aus­si répan­du que le meurtre quand on sup­prime l’au­to­ri­té…), de dia­logues d’une niai­se­rie ache­vée ou encore d’une volon­té de faire arty un peu snob bour­ré de réfé­rences trop visibles (oui oui, mon­sieur DeMonaco, on a bien com­pris que vous avez aimé Orange méca­nique).

Dans l’en­semble, c’est donc regar­dable, vague­ment amu­sant de temps en temps, mais fran­che­ment pas bouleversant.

¹ Le Comité anti-tra­duc­tions foi­reuses a vali­dé la conser­va­tion du titre ori­gi­nal pour ce film, dis­tri­bué contre toute rai­son sous le titre American night­mare.

² À ma connais­sance, aucun rap­port avec Stéphanie.