Ocean’s 8

de Gary Ross, 2018, ***

Il est de bon ton, depuis quelque temps, de faire des remakes ou des suites de films connus en mul­ti­pliant les pre­miers rôles fémi­nins. Il est de bon ton, depuis lors, de des­cendre en flèche ces films, qui ne sont for­cé­ment que de « pâles remakes nés de la bien-pen­sance poli­ti­que­ment cor­recte » ou autre truc du genre. L’exemple typique fut le S.O.S. fan­tômes de 2016, plom­bé par la cri­tique alors qu’­hon­nê­te­ment, c’é­tait une comé­die légère, bien ser­vie, qui tour­nait sans problème.

Les actrices des années 90 croisent les musi­ciennes des années 2010. — pho­to Warner Bros

Ocean’s 8 souffre du même phé­no­mène, mais à une échelle supé­rieure. D’abord, il reprend évi­dem­ment les fon­da­men­taux des Ocean’s (11, 12, 13) mais en rem­pla­çant leur cas­ting essen­tiel­le­ment mas­cu­lin (aux excep­tions de Julia Roberts et Catherine Zeta-Jones) par une équipe tota­le­ment fémi­nine. Ensuite, il reprend les idées d’une tri­lo­gie de Steven Soderbergh, déi­fié de son vivant par une bonne par­tie de la cri­tique, alors qu’il est signé Gary Ross (alias « ah, ah, ah, le mec qui a pon­du Hunger games ?! »). Autrement dit, tout est réuni pour exci­ter le carac­tère de hyène du cri­tique de base.

Alors, faut-il se battre pour sau­ver Ocean’s 8 ?

J’hésite un peu, honnêtement.

D’un côté, il ne mérite clai­re­ment pas d’être qua­li­fié de « cla­fou­tis de gim­micks du film de casse ». Il reprend évi­dem­ment les codes du genre et mul­ti­plie les clins d’œil, mais voi­là, mon­sieur des Inrocks : les trois pré­cé­dents aus­si, c’est le prin­cipe même de la série. Il ne mérite pas qu’on défonce ses per­son­nages, qui ne sont ni plus ni moins cari­ca­tu­raux que les pré­cé­dents, ni son manque d’am­bi­tion au-delà du pur diver­tis­se­ment, tout aus­si valable pour les Soderbergh. Quant à le qua­li­fier de « diver­tis­se­ment méca­nique, défi­lé de stars, de botox et de pla­ce­ments de marques » (L’Obs), c’est là encore tota­le­ment valable pour les pre­miers films, en par­ti­cu­lier Ocean’s 13.

Le but : chou­ra­ver le col­lier qui sera sur ce cou. — pho­to Warner Bros

D’un autre côté, il ne mérite pas non plus qu’on se fatigue à le défendre. Oui, il se contente d’être dis­trayant ; non, il n’a aucune pré­ten­tion de gran­deur ; évi­dem­ment, la réa­li­sa­tion est facile ; sans aucun doute, le scé­na­rio est inuti­le­ment alam­bi­qué pour jus­ti­fier la pré­sence des huit cas­seuses et ral­lon­ger la sauce ; incon­tes­ta­ble­ment, il laisse une impres­sion de déjà-vu.

Efficace, pre­nant sans être fati­gant, bien fait mais pas vir­tuose, ni détes­table ni admi­rable en somme, Ocean’s 8 est dans la lignée de ses aînés. Comme eux, il est tout ce qu’on peut vou­loir pour se détendre un dimanche soir. Et comme eux, il n’est rien de plus.