Laisse-moi entrer
|de Matt Reeves, 2010, ****
Vous le savez, puisque vous me lisez régulièrement (sinon, vous devriez), j’ai découvert il y a quelque temps un cinéma que je connaissais pas : les films suédois sont terribles. Arriver à mélanger rire et gore, trash décomplexé et violence gratuite, je sais pas si vous voyez… Disons l’esprit Ranxerox, si ça vous parle mieux.
L’un des premiers que j’ai vus était Morse, de Tomas Alfredson. Drôle, décalé, élégamment gore, il n’hésitait pas à mettre en scène une petite fille si mignonne et tellement fragile qu’elle vous découpait la tête sans hésiter — oui, on retrouve un peu ça dans Kick-Ass, c’est vrai. Morse était hélas un peu mou du genou, avec une introduction trop longue qui cassait le film.
Or, Laisse-moi entrer en est un remake officiel, ou plutôt l’adaptation américaine du même roman. On retrouve certaines scènes rigoureusement à l’identique, d’autres sont remaniées, mais globalement Laisse-moi entrer est un nouveau film : moins drôle, un peu moins gore aussi, et peut-être censuré par certaines pudibonderies américaines, il est plus sérieux et plus lourd que le modèle suédois.
Il est aussi, et c’est heureux, bien mieux réalisé. Le rythme est tout aussi lent dans la première partie (les films font sensiblement la même durée), mais mieux géré, avec une progression plus régulière. D’une certaine manière, les personnages principaux sont aussi mieux exploités, avec quelques détails un peu plus creusés — notamment dans l’aménagement de l’appartement où vit Abby.
Les acteurs sont irréprochables, sans grande surprise il est vrai : Kodi Smit-McPhee était le fils dans l’admirable La route, Chloë Moretz était la « grande sœur » du héros dans le superbe (500) jours ensemble et surtout l’inoubliable Hit Girl du jouissif Kick-Ass. Le couple fonctionne parfaitement, de même que les faire-valoir — les sales petits cons sont troublants de réalisme. Seuls les adultes sont un peu en retrait, à la notable exception du flic de service (Richard Jenkins, inattaquable éternel second rôle), mais il faut admettre que ce ne sont manifestement pas les personnages qui ont le plus intéressé l’auteur.
Au global, c’est donc très très bon. Ce n’est pas vraiment un film suédois, mais c’est une excellente bizarrerie américaine.