Maggie

de Henry Hobson, 2014, ****

Alors voi­là, ça se passe au Kansas, il y a une épi­dé­mie de zom­bi­fi­ca­tion, et Maggie est tou­chée. Wade, son père, vient la cher­cher à l’hô­pi­tal pour la rame­ner en famille.

Certes, la mode est aux zom­bies, mais ceci n’est pas un film de zom­bie. C’est un film sur la fin de vie, avec une ambiance beau­coup plus proche de Les inva­sions bar­bares (en moins drôle) ou de Alabama Monroe (en moins bou­le­ver­sant) que de Zombie et autres Walking dead. Finalement, l’é­pi­dé­mie est utile pour l’as­pect social — Maggie peut deve­nir une menace pour sa famille et pour son entou­rage — et le côté zom­bie est utile pour mon­trer la pro­gres­sion de la mala­die, mais Maggie aurait pu être condam­née par beau­coup d’autres choses sans radi­ca­le­ment chan­ger le film. Le sujet, c’est sur­tout celui d’une jeune fille qui sait qu’elle va mou­rir et, à la fin, être dan­ge­reuse pour ses parents, et d’un père qui sait que sa fille va mou­rir et qu’à la fin, ça sera son bou­lot de s’as­su­rer qu’elle ne mette per­sonne en danger.

Cette ambiance natu­rel­le­ment lourde est excel­lem­ment sou­te­nue par des choix gra­phiques assez clas­siques, mais par­fai­te­ment maî­tri­sés : Lukas Ettlin, direc­teur de la pho­to­gra­phie, a fait un tra­vail magni­fique, jouant beau­coup sur la com­po­si­tion, les contrastes, les cou­leurs et les éclai­rages, que ce soit pour magni­fier un champ de blé ou pour sou­li­gner la sépa­ra­tion entre le duo père — fille et le reste du monde. Le résul­tat est splen­dide et tranche agréa­ble­ment dans un pay­sage ciné­ma­to­gra­phique trop sou­vent assez homogène.

Go to sleep, little baby: your mamma's gone away and your daddy's gonna stay… photo Metropolitan FilmExport
Go to sleep, lit­tle baby : your mam­ma’s gone away and your dad­dy’s gon­na stay… pho­to Metropolitan FilmExport

Les acteurs, enfin, tiennent très bien leur rang ; on ne don­ne­ra d’Oscar à aucun d’entre eux pour ce film, mais les per­for­mances sont hono­rables et tout à fait cré­dibles. Schwarzenegger est éton­nam­ment bon, et même par­fois tou­chant ; c’est sans doute une très grande injus­tice que de savoir qu’on retien­dra tou­jours ses rôles dans Terminator, L’effaceur, Total recall ou même La course au jouet, alors qu’il aura tout de même tenu un vrai bon rôle, auquel son jeu sobre aura don­né une cer­taine pro­fon­deur et une jus­tesse délicate.

L’ensemble est lent, contem­pla­tif, beau, tendre et tou­chant par­fois, dur et sai­gnant de temps en temps, et repose sur une ambiance soli­de­ment déses­pé­rée éclair­cie de quelques fous rires épars. Peut-être pas un chef-d’œuvre abso­lu, mais un petit bijou dis­cret et fort réussi.

(Ah, y’a tout de même un ou deux faux rac­cords, dont un plan où la main gauche de Maggie, abî­mée un peu plus tôt, est visi­ble­ment indemne. Rien de méchant, mais ça peut surprendre.)