The OA

de Brit Marling et Zal Batmanglij, 2016, ***

Une aveugle, dis­pa­rue pen­dant sept ans, retourne chez ses parents adop­tifs et réunit cinq incon­nus pour une mis­sion mys­té­rieuse. Voilà, en peu de mots, le point de départ de The OA, une série qui oscille entre le polar et le fan­tas­tique, qui pioche des élé­ments aus­si bien chez Thorgal (bien que Khatun soit un peu moins sexy que la Gardienne des clefs) que chez Les Goonies (avec beau­coup moins de vélos tout de même), et qui est tour à tour tra­gique, comique et héroïque.

Un groupe qui se réunit le soir pour écou­ter le gou­rou. Non non, c’est pas une secte. — pho­to Myles Aronowitz pour Netflix

Bon, vous me connais­sez : avec ce genre de réfé­rences, nor­ma­le­ment, j’aime. Et de fait, The OA a bien des qua­li­tés, à com­men­cer par une ambiance pre­nante et une alter­nance de nar­ra­tion bien vue, per­met­tant au spec­ta­teur de décou­vrir simul­ta­né­ment les évé­ne­ments de l’ère moderne et ceux qui y ont mené. L’enfance de Prairie, ses rêves, sa cap­ti­vi­té sont ain­si racon­tés en paral­lèle à son retour, aux dif­fi­cul­tés de retrou­ver sa famille et de s’y ajus­ter, et à son plan fou pour résoudre ses pro­blèmes. C’est fran­che­ment très bien fait, la pro­gres­sion conver­gente est impla­cable et les élé­ments du puzzle s’as­semblent peu à peu. Le cas­ting est soi­gné est, si les per­son­nages ne sont pas exempts de cli­chés — ceci est une litote —, les dia­logues plu­tôt soi­gnés et les acteurs convain­cus se chargent de faire pas­ser le tout. La série a donc un corps, une ambiance et un propos…

Oups, c’est là que le bât blesse. Un pro­pos, dites-vous ? Non, pas vrai­ment en fait. Le finale ne colle pas au reste est, bien que l’on ima­gine volon­tiers que cette scène fût dans l’es­prit de ses créa­teurs un som­met de ten­sion dra­ma­tique, ce retour au lycée semble sur­tout rajou­té sur la soupe parce qu’on ne savait pas com­ment bou­cler la sai­son. C’est un peu comme si, à la fin d’une tablette de cho­co­lat aux amandes, vous tom­biez sur un rai­son sec, tout seul dans la der­nière bou­chée : ça n’est pas mau­vais en soi, mais ça n’a rien à voir avec le reste et sa pointe d’a­ci­di­té casse le goût déli­cat d’a­mande que vous comp­tiez gar­der en bouche quelques minutes.

En 2016, Netflix aimait bien enfer­mer des héroïnes dans des sca­phandres pour leur faire vivre des expé­riences mys­tiques. — pho­to Jojo Whilden pour Netflix

Restent sept épi­sodes soi­gnés, une pro­gres­sion où les mys­tères se répondent peu à peu, une vision oni­rique de la mort peu­plée d’é­chos de reli­gions païennes (je vous ai dit que ça rap­pe­lait Thorgal ?), un thril­ler effi­cace, des scènes de claus­tro­pho­bie étouf­fantes, une direc­tion d’ac­teurs louable et une ambiance par­ti­cu­liè­re­ment réus­sie. Le pro­blème, c’est qu’on ne peut même pas faire comme si la fin n’exis­tait pas et cou­per avant comme pour 11.22.63 : le dénoue­ment est indis­pen­sable, tout en débar­quant sans rap­port avec le schmilblick.