Les mondes de Ralph

de Rich Moore, 2012, ****

Et si les per­son­nages de jeux d’ar­cade étaient des êtres conscients, des acteurs jouant la pièce que les joueurs leur écrivent ? C’est un peu l’i­dée du film, qui com­mence avec les états d’âme de Ralph, méchant du jeu des années 80 Fix it Felix Jr, dont la borne conti­nue à atti­rer quelques joueurs dans une salle d’ar­cade per­due. Ralph aime­rait être un héros, au lieu d’être tou­jours le méchant ; et le soir venu, il quitte son jeu pour aller boire un verre dans la mul­ti­prise qui réunit toutes les bornes de la salle, ou tente une thé­ra­pie de groupe avec les autres méchants — Zangief de Street figh­ter, le Dr Robotnik de Sonic, etc., sous la direc­tion du fan­tôme orange de Pac-Man. Lorsque l’i­dée lui vient de chan­ger d’i­mage en allant jouer un des gen­tils dans un jeu de bas­ton, les ennuis commencent…

Il y a un truc para­doxal avec Les mondes de Ralph. Sur le papier, ce film a beau­coup de défauts que je déteste : les mes­sages évi­dents en forme de « faut voir les bonnes choses dans tout bou­lot de merde », « cha­cun a une place dans la vie », « accepte-toi toi-même » etc., une bonne dose de gui­mauve (lit­té­ra­le­ment aus­si, d’ailleurs), tout ça.

Pourtant, c’est un des films où je me suis le plus écla­té cette année.

Il y a sans doute une expli­ca­tion toute simple : bien que clas­sé « pour enfants à par­tir de trois ans », Les mondes de Ralph a un cœur de cible bien iden­ti­fié, et c’est moi — le type qui avait quinze ans dans les années 90, qui a connu la tran­si­tion entre les jeux de pla­teaux 2D façon Street figh­ter et l’im­mer­sion 3D à la Half-life, qui a pas­sé des heures sur Pac-Man (ou plu­tôt Lock’n’Chase dans mon cas) et sur Mario kart… Le film mul­ti­plie les réfé­rences, cer­taines dis­crètes, d’autres expli­cites, et rajoute quelques détails cultu­rels de la même géné­ra­tion (je sais pas si les jeunes d’au­jourd’­hui jouent tou­jours à balan­cer un Mentos dans une bou­teille de Coca, mais je me sou­viens avoir assis­té à ce genre de chi­mie amu­sante dans ma jeu­nesse). Du coup, quand je vois un code Konami, je me retrouve y’a quinze ans, et je marche comme un gosse.

À côté de ça, il convient de noter une réa­li­sa­tion sans faille, des pas­sages du monde exté­rieur au monde des jeux très réus­sis, un rythme nar­ra­tif très bien géré, plein de petits détails bien vus (« Ouahou, vous êtes… vous êtes en HD !!! Vous êtes belle… »), des ambiances colo­rées variées et bien rendues…

Dans l’en­semble, mal­gré un mes­sage un peu culcul sur les bords, Les mondes de Ralph est donc, pour moi, un peu comme une méga-made­leine à savou­rer sans hésitation.